En avril 2015, la présidente du Parlement grec Zoe Konstantopoulou avait porté sur les fonds baptismaux une commission Vérité chargée d'expliquer comment un pays comme la Grèce, pays moderne et développé, avait pu sombrer en quelques années, victime de son sur-endettement, dans un état de quasi-faillite.
Quelques dizaines d'économistes, d'experts se sont donc penchés sur la question et ont donc rendu leur copie. Une copie sans appel. Ici, point de cigales hellènes ou d'indolence méditerranéenne comme facteurs explicatifs de la banqueroute, mais la description d'un terrible échec : celui de la Troïka à « sauver la Grèce »… à moins qu'elle ne soit intervenue que pour sauver les banques.

Le livre est technique, bardé de chiffres et de graphiques, et sa lecture est, avouons-le, quelque peu rébarbative. Il confirme ce que nombre d'analystes ont rappelé depuis quelques années. Très schématiquement, on y apprend qu'avant que la Troïka n'intervienne, la dette grecque était une dette bancaire privée, fruit de la cupidité (pardon, du goût du risque) de nos banquiers et des politiques de l'oligarchie au pouvoir, mais fruit également de l'intégration européenne de la Grèce en 1981 puis de l'adoption de la monnaie unique ; que l'aide de la Troïka n'avait pour but que le sauvetage des banques en transformant les dettes privées en dettes publiques ; qu'en d'autres termes les principaux bénéficiaires des fumeux plans de sauvetage furent les banques privées ; que les conditionnalités imposées par la Troïka sont inacceptables non seulement d'un point de vue éthique, mais également au regard des règles européennes elles-mêmes, suintantes de bons sentiments ; qu'enfin les conséquences sociales de ces politiques austéritaires sont catastrophiques et contre-productives puisqu'elles détruisent les filets sociaux de protection sans rendre pour autant l'économie du pays plus compétitive.
Fort de ce constat, la commission considère que les Grecs et leur Etat n'ont pas, ne doivent pas accepter de se saigner aux quatre veines pour rembourser une dette, produit d'un capitalisme nourri à la spéculation et au court-termisme mais aussi de la politique de la Troïka « première responsable du désastre économique et social qui s'est abattu sur le pays. » La Grèce doit faire valoir son droit à « l'insolvabilité unilatérale », souveraine.
Il n'y a pas de révélations dans cet ouvrage et ce n'était d'ailleurs pas le but des experts qui ont collaboré à sa réalisation. Ce livre marque une étape dans le combat qui oppose toujours les tenants de l'ordo-libéralisme à Syriza, gauche qualifiée alors de radicale, devenue gauche de gouvernement, et qui n'a guère tardé à décontenancer ses partisans.