1914-1918, « A bas la guerre ! »

1914-1918, quatre années de guerre, de sang, de tripes, de larmes. Quatre années passées dans la boue des tranchées, parmi les rats, les cadavres pourrissant et la vermine. Quatre années passées dans la peur de la mort, dans le fracas des bombes ; baïonnette au canon, hurlant pour se donner le courage nécessaire, sortir de la tranchée, gagner le parapet et prier pour ne pas être fauché par la mitrailleuse. Ypres, la Marne, le sentier des Dames... et le sang impur rejoint le nôtre dans le sillon.
Quatre années passées sous les ordres des brutes galonnées, à subir leur rhétorique sur les Boches. Le Boche est ceci, le Boche est cela, le Boche est ainsi. Mais le Boche est comme nous. C'est qu'un pauvre poilu qui n'a jamais demandé à venir là. Le Boche ne veut pas plus faire la guerre que nous. Il veut manger à sa faim, serrer dans ses bras sa femme et embrasser ses enfants. S'ils l'aiment tant cette guerre, les brutes galonnées, qu'ils la fassent à notre place ! Pauvres de nous qui les avons cru quand ils claironnaient que nous serions à Berlin avant l'hiver. Mais ici, c'est pas Berlin. C'est la campagne du Nord et de l'Est, une campagne dévastée, trop froide l'hiver, étouffante l'été.

1914-1918, quatre années de guerre, de sang, de tripes et de larmes. La Grande Boucherie mérite bien son surnom. Mais à certains endroits du front, il se passa des choses étonnantes ; des choses si étonnantes qu'on les passa sous silence. Je ne parle pas seulement de l'hiver 1914 où soldats anglais et allemands décidèrent sur le tas de s'offrir une trêve : une poignée d'heures sans bombes, sans peur, sans camarade lâchant son dernier râle sur le no man's land. Je parle de cette fraternisation instituée en certains lieux du front par les poilus eux-mêmes, de cet accord tacite de ne point trop se faire la guerre dès que les brutes galonnées eurent le bon goût de gagner l'arrière. Par lassitude, par pacifisme, qu'importe. Comme l'écrit un soldat du 38e régiment d'infanterie, « nous voulons la paix ! Blanche ou noire, ça nous est égal, ça nous rapportera pas plus d'une façon que de l'autre, nous serons les bonnes poires jusqu'au bout car les jusqu'au-boutistes font toujours bon marché de la vie des pauvres. »

Bienvenue parmi les poilus et leurs paroles.