Peter McPhee, Robespierre. Une vie révolutionnaire, Classiques Garnier, 2022.

Avec cet ouvrage, l’historien Peter McPhee nous éclaire sur la vie d’une des personnalités les plus controversées de l’histoire nationale.

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Paru en anglais en 2012 et traduit dix ans plus tard par les éditions Garnier, ce livre trouve son origine dans l’incapacité de l’auteur, alors jeune étudiant, à comprendre le destin posthume de Robespierre : « Comment (était-il) possible qu’un homme qui incarnait les principes les plus élevés de 1789 puisse être considéré comme la personnification du “règne de la Terreur” en 1793-1794 »?
Pour les uns, Maximilien Robespierre était l’Incorruptible, l’intégrité faite homme en ces temps bouleversés. Pour d’autres, il fut un monstre, un tyran sanguinaire. Qui était donc Maximilien Robespierre ?

Peter McPhee nous met dans les pas de ce rejeton de la bourgeoisie d’Arras, né en 1758, dont on ne sait finalement pas grand-chose, sinon qu’il eut une enfance douloureuse et qu’il fut un élève suffisamment brillant pour qu’une bourse lui permette de poursuivre ses études dans un prestigieux collège parisien. Diplômé en droit, il retourne dans sa ville natale où jusqu’à la veille de la Révolution française, il essaie de vivre de son métier. A travers ses plaidoiries, ses écrits, se dessine le portrait d’un homme soucieux de reconnaissance, sensible aux questions sociales comme à l’émancipation féminine ; un homme qui compte peu d’amis dans la noblesse et la bourgeoisie locales. Les nobles critiquent ses idées avancées et les bourgeois goûtent peu sa sollicitude à l’égard du peuple ; d’un peuple pauvre et ignorant dont Robespierre ne cesse de célébrer la vertu !

Robespierre fait partie de ces plus de 600 députés du tiers-état élus et rassemblés à Paris en ce printemps 1789. Il fait entendre sa voix et ne laisse pas indifférent dans cette assemblée de bourgeois. Il est de tous les combats, qu’ils concernent le droit de chasse, le statut des curés ou encore l’esclavage. Il y gagne une réputation d’homme intransigeant voire « inconciliant », austère et orgueilleux : « Le peuple est si convaincu de la vertu de Robespierre, a écrit un de ses amis politiques, (…) qu’il le verrait voler dans les poches du voisin sans y croire. » ; « il a tous les caractères, non pas d’un chef de religion, mais d’un chef de secte, écrit Condorcet. Il se dit l’ami des pauvres et des faibles, il se fait suivre par des femmes et des faibles d’esprit. »

Tel est l’homme qui bientôt sera au premier rang, votant pour l’exécution de Louis XVI, appelant à « exterminer tous les rebelles de la Vendée », et cela au nom de la liberté, de l’égalité, de la défense des opprimés et d’une Révolution attaquée de toute part, y compris de l’intérieur ; combat qui fait de lui un homme « physiquement, émotionnellement et intellectuellement éreinté », nous dit Peter McPhee, en ces temps où l’on ne peut avoir confiance en personne. Il fut tout autant un acteur qu’une victime de la Terreur, quand en juillet 1794, il fut conduit à l’échafaud. La Terreur ne fut pas son œuvre, mais celle d’un pouvoir aux abois, et se débarrasser de lui fut une façon habile pour beaucoup de faire oublier leur implication dans son déploiement1.

Sans verser dans les analyses psychologisantes, Peter McPhee nous livre le portrait d’un homme à la personnalité complexe, ni ange, ni démon, emporté par une Révolution qui se mourrait elle-même.

1. Jean-Clément Martin, Robespierre - La fabrication d'un monstre, Perrin, 2016 ; Les échos de la Terreur : Vérités d'un mensonge d'Etat 1794-2001, Belin, 2018.