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Depuis le début du XXe siècle, Jack London, Californien de basse extraction sociale, homme aux mille métiers, est un auteur reconnu, célèbre et honoré malgré ses convictions politiques radicales et ses engagements dans le mouvement socialiste et syndicaliste révolutionnaire. Mais c’est un homme qui va bientôt basculer… C’est pourquoi Le Mexicain est un objet littéraire singulier, non par sa forme ou son contenu mais par la place qu’il occupe dans l’oeuvre de son auteur : celle de sa dernière œuvre politique, celle qu’il a écrite avant de dire adieu à la Révolution des « socialistes, anarchistes, vagabonds, voleurs de poules, hors-la-loi et autres citoyens indésirables ».

Le héros de cette nouvelle est un jeune homme taciturne, un concentré de hargne et de colère. Felipe Rivera a une tête et deux poings. Une tête pour penser la Révolution nécessaire, deux poings pour la faire advenir. Rivera est économe de ses mots. Il parle peu, il ne disserte pas, il frappe. Rivera est boxeur et avec lui, c’est l’Emancipation sociale qui enchaîne les jabs au corps, les directs, les crochets, c’est la Révolution qui sue, encaisse, plie, se redresse, encaisse de nouveau et se déchaîne. Face à lui, il n’a pas qu’un adversaire, une pointure du ring arrivé de l’Est, mais tout un système corrompu, haineux, raciste qui ne voit en lui qu’un métèque qu’il faut remettre à sa place. Rivera le sait mais rien ne peut l’arrêter, car il n’est pas seul sur le ring, il a avec lui la foule immense des prolétaires et des peones mexicains que la mitraille a couché sur le flanc. Il a avec lui la promesse d’un avenir enfin digne d’être vécu.
Combat pour la vie, combat pour la Révolution. En une cinquantaine de pages, London rendait hommage à la force mentale d’un humble, capable de déplacer les montagnes pour qu’advienne le socialisme. Quelque temps plus tard (il meurt en novembre 1916), il rendait hommage à l’ingérence américaine et flétrissait l’indolence mexicaine...