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Ce livre court comprend deux parties. On y trouve le Rapport d'enquête du parlement européen sur l'action de la Troïka, dont Liêm Hoang-Ngoc fut l'un des corapporteurs, et surtout, le précédant, une longue analyse de Hoang-Ngoc sur la façon dont les élites politiques européennes ont géré de façon fort ordolibérale la crise. Si le rapport, par sa forme (celle d'une résolution adoptée en mars 2014 par le Parlement), est d'une lecture rébarbative, il n'en est pas de même du texte de Hoang-Ngoc, aussi clair qu'éclairant, qui pourrait se résumer ainsi :
- La Troïka, « groupe informel d'experts et de fonctionnaires représentant les créditeurs engagés dans le soutien financier à des Etats de la zone euro », création techno-bureaucratique de l'Eurogroupe, n'a recherché aucune légitimité démocratique ;
- Sa politique anti-crise s'est résumée à des politiques d'austérité drastiques dont les classes moyennes et populaires ont fait principalement les frais (baisse des salaires, coupes dans les budgets sociaux, hausse des impôts, réforme libérale du droit du travail…)1 ;
- Ses politiques antisociales ont globalement échoué, hormis sur un point : la mise au rencard de la plupart des filets de protection sociale, autrement dit des Etats-providence2 ;
- Si la Banque centrale européenne, organisme indépendant, a jugulé la spéculation, elle s'est aussi comportée comme une vulgaire banque prédatrice en refusant de s'asseoir sur les obligations souveraines qu'elle détenait.
- La BCE a commis l'exploit de se montrer plus radicale dans ses choix que le FMI. A la restructuration des dettes souveraines, elle a préféré la cure d'austérité (autrement dit la récession) dont les victimes mettront des décennies à se remettre.

Mais qu'importe les victimes si le système survit ! Comme le souligne Jeroen Djisselboem, président social-démocrate de l'Eurogroupe, grâce à ces mesures « difficiles mais nécessaires (…) la stabilité financière a été sauvegardée et les bases ont été posées pour une croissance durable et la création d'emplois. » Show must go on...

Note :
1. Cette brochure doit également beaucoup aux encadrés judicieux qui parsèment ses pages notamment ceux qui concernent les réformes structurelles imposées par la Troïka aux pays endettés (Grèce, Portugal, Irlande, Chypre).
2. Certains rétorqueront que la baisse du chômage irlandais est un signe que le pays sort de la crise. Mais quand on sait que cette baisse est intimement liée à l'exil contraint de centaines de milliers de jeunes Irlandais vers l'Angleterre, l'Australie ou le Canada, on est bien obligé de la relativiser.