Non, cette année 2012 sera pourrie parce que tous les indicateurs économiques le disent : le chômage devrait dépasser les 10% de la population active, l'économie française devrait entrer en récession, le pouvoir d'achat devrait baisser du fait des hausses diverses et variées que nous apportent d'ordinaire les étrennes. Même Nicolas Sarkozy est d'accord avec moi. Il l'a dit lors de ses voeux à la Nation : « Cette crise qui sanctionne 30 années de désordres planétaires dans l'économie, le commerce, la finance, la monnaie, cette crise inouïe, sans doute la plus grave depuis la deuxième guerre mondiale, cette crise n'est pas terminée. » Mais comme il ne veut pas désespérer Neuilly, il a bien sûr ajouté qu'il « y a des raisons d'espérer et que nous devons, nous pouvons garder confiance dans l'avenir. » Il a même dit que son devoir était de faire face et de nous protéger. De Claude Guéant ? Non, plutôt des agences de notation et des emballements des marchés financiers, même s'il a assuré que « ce ne sont ni les marchés, ni les agences qui feront la politique de la France ». C'est son côté gaullien...

Bref, je vous souhaite une belle et bonne année 2012. Trop occupé à tartiner des toasts tièdes de foie gras premier prix, je n'ai pas écouté le discours présidentiel. Mais je l'ai lu, et il y a une phrase qui m'a beaucoup plu. Après avoir solennellement demandé à « tous les décideurs des entreprises et de l'économie à tout faire pour préserver l'emploi », il a appelé « tous les acteurs des services publics à redoubler de prévenance pour tous ceux qui ont besoin de notre solidarité. » J'adore quand un décideur emploie le mot de « prévenance » qui signifie, si j'en crois mon vieux dictionnaire, « manière obligeante d'aller au-devant de ce qui peut plaire à quelqu'un ».

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Car un décideur ne va jamais « au-devant de ce qui peut plaire à quelqu'un ». Dans le cas présent, les travailleurs de Pôle Emploi clament depuis des mois et des mois que la fusion a provoqué un bordel sans nom, qu'ils sont dans l'incapacité de répondre correctement aux missions qu'on leur a confiées, que cette situation provoque inévitablement des tensions avec les chômeurs qui, excédés, s'en prennent évidemment à la personne qui leur fait face et non à celles et ceux qui ont mis en place cette usine à gaz. Et quand je dis « fait face », je n'oublie pas que dans le monde contemporain, la règle est plutôt de mettre à distance la personne en demande d'informations par le biais des plateformes téléphoniques ou de questionnaires à remplir en ligne, par la grâce de l'internet.

A ces revendications, nos décideurs ont répondu en décembre par une nouvelle convention. Une nouvelle convention qui vise à « rationaliser » les moyens à disposition, ce qui veut dire, en langage profane, « faire mieux à moyens constants », ce qui signifie concrètement faire le tri entre le chômeur « rentable » (celui qui permet de remplir les objectifs) et les autres, mettre la pression sur le chômeur pour qu'il accepte les propositions d'emploi ou les formations qu'on lui propose sans sourciller, et radier bien évidemment les récalcitrants qui n'ont pas encore compris qu'un chômeur est avant tout un coupable qui doit s'amender. En un sens, les travailleurs de Pôle Emploi sont sommés d'être prévenants, non à l'égard non des victimes de la crise mais des employeurs.