Le Monde comme il va - Tag - AfriqueLe Monde comme il va, magazine anticapitaliste et libertaire, était une émission de radio hebdomadaire diffusée tous les jeudis à partir de 19h10 sur Alternantes FM, entre janvier 1999 et juin 2011. L'émission hebdomadaire a été remplacée par une chronique hebdomadaire diffusée chaque vendredi matin à 7h55 dans le cadre des Matinales d'Alternantes FM, toujours !2024-03-24T21:48:22+01:00Patsyurn:md5:18ad09a0b93313ed3ffae6b27434a016DotclearDes bonobos et des hommesurn:md5:8946659789707e3d0e45cace843517942014-12-19T14:34:00+00:00PatsyNotes de lectureAfriqueEcologie<p><strong>Deni Béchard</strong><br />
<em>Des bonobos et des hommes - Voyage au coeur du Congo</em><br />
Ecosociété, 2014<br />
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Avec son imposant Congo<strong>1</strong>, David Van Reybrouck nous plongeait dans le chaos congolais, et le lecteur en ressortait bouleversé par tant de malheurs, impressionné par la capacité des habitants à se maintenir en vie malgré le tumulte, mais surtout effrayé à l'idée qu'aucun destin autre que misérable ne puisse sortir de ce sol si fécond et si convoité.</p> <p><img src="http://patsy.blog.free.fr/public/Bechard.jpg" alt="Bechard.jpg" style="display:block; margin:0 auto;" title="Bechard.jpg, déc. 2014" /><br /><br />
Deni Béchard nous montre un autre Congo. Il ne nie évidemment pas les violences, coloniales et post-coloniales, les guerres à répétition, les politiques prédatrices de tous les acteurs, la corruption omniprésente et cette misère effroyable qui frappe l'essentiel des Congolais. Mais Deni Béchard nous dit aussi qu'il y a des raisons d'espérer, que le pays est en plein bouleversement depuis que la Chine s'y est impliquée, et que ce frémissement peut se faire sentir jusqu'au fin fond de la forêt équatoriale. C'est là que vivent les bonobos, ces grands singes pacifiques devenus célèbres pour leur façon de désamorcer les conflits sociaux par le truchement de la sexualité. Déni Béchard, fasciné par ces « hippies de la forêt », est allé à leur rencontre en se mettant dans les pas d'une poignée de conservationnistes irréductibles, créateurs d'une ONG appelée Bonobo Conservation Initiative (BCI). <br /></p>
<p>Il délivre de belles pages sur ces bonobos aux comportements si touchants et fragiles. Il se plaît à espérer que les bipèdes que nous sommes comprennent qu'ils ont plus à gagner à prendre exemple sur leur pacifisme foncier que sur l'esprit grégaire et violent des chimpanzés avec qui on les a souvent comparés.<br />
Il nous décrit un monde d'ONG auto-centrées, paternalistes et néo-coloniales, toujours en quête de fonds pour vivre et faire vivre une bureaucratie pléthorique<strong>2 </strong>. Rien de tel avec BCI qui a mis les populations congolaises au coeur de son projet de sauvegarde des bonobos, pour en faire les véritables gestionnaires des réserves, c'est-à-dire des espaces ouverts et non clos comme le sont les grands parcs. BCI a investi dans l'humain, autrement dit a pris le temps de convaincre les populations locales qu'elles trouveraient avantage à protéger les bonobos plutôt qu'à les tuer pour leur viande, alors même que leur survie est en jeu chaque jour.<br />
Ce travail nécessite beaucoup de pragmatisme car les militants, congolais et étrangers, du BCI ont compris que pendant trop longtemps les habitants ont été bernés, floués, humiliés par des mundele<strong>3</strong> arrogants, que les Anciens des villages sont des « mines de savoir » et donc des appuis indispensables aux projets de conservation, que les cadres politiques sont tout aussi indispensables tant leur pouvoir de nuisance peut être important ; BCI a décidé de faire avec les habitants et de faire en sorte que les « gens ne se sentent pas moins précieux que les animaux à protéger ». Pragmatiques encore quand ils tablent sur le développement de l'écotourisme comme moteur d'un développement local qui serait moins dévastateur que les plantations d'huile de palme ou de café.<br /></p>
<p><em>Des bonobos et des hommes</em> est un vibrant plaidoyer pour une protection de l'environnement construite et pensée aussi bien par les scientifiques/activistes que par les populations locales ; et les dizaines de Congolais investis dans ce combat attestent que Sally Jewel Coxe, l'âme infatigable de BCI, a rempli sa mission : elle n'est plus indispensable à la défense des bonobos.<br />
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<strong>Notes</strong><br />
<strong>1.</strong> David Van Reybrouck, <em>Congo – Une histoire</em>, Actes Sud, 2012.<br />
<strong>2.</strong> Citant BCI, il écrit : « « Ce ne sont ni les ministères, ni les fonctionnaires corrompus, ni l'infrastructure en ruine qui posent les pires difficultés pour le travail de conservation entrepris par BCI et ses partenaires, mais bien les ONG rivales », notamment les « grandes ONG de conservation débarquées au Congo ».<br /></p>La guerre au Mali : comprendre la crise au Sahel et au Saharaurn:md5:49cdfbcd198e7c50b19494a57ead9bc72013-09-03T22:24:00+01:00PatsyAfriqueImpérialisme<p><strong>Michel Galy (sous la direction de)</strong><br />
<em>La guerre au Mali – Comprendre la crise au Sahel et au Sahara : enjeux et zones d'ombre</em><br />
La découverte, 2013.<br />
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Le 11 janvier 2013, l'armée française intervient au Mali pour repousser les groupes djihadistes en route pour la capitale, Bamako. Solennel et droit dans ses bottes, François Hollande, président socialiste, déploie une rhétorique qui doit tout à Georges Bush pour justifier cette opération de police internationale de grande envergure. C'est donc au nom de la lutte, de la croisade contre le terrorisme que le drapeau bleu-blanc-rouge se doit d'aller flotter sur Mopti, Gao, Tombouctou et Kidal.<br /></p> <p>C'est ainsi : il suffit de dire que l'on agit contre le terrorisme islamique, contre le djihadisme pour que la controverse disparaisse des grands écrans aux heures de grande écoute. Le nouveau grand Satan porte la barbe et agite le Coran, qu'on se le dise ! D'où l'intérêt de lire l'ouvrage coordonné par Michel Galy, professeur de géopolitique, ouvrage intitulé <em>La guerre au Mali – Comprendre la crise au Sahel et au Sahara : enjeux et zones d'ombre</em>.<br />
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Ce n'est pas parce que Sahel et Sahara sont des zones de pauvreté endémique sur lesquelles ne poussent que du sable et de la caillasse qu'elles ne sont pas des enjeux géostratégiques pour les états de la région et au-delà. Depuis les Indépendances (ou ce que l'on appelle ainsi), cette zone est un objet de convoitise et un outil fort ancien pour déstabiliser le voisin, comme l'attestent le soutien algérien aux rebelles du Front Polisario en lutte contre la monarchie marocaine ou les tribulations de feu Kadhafi dans le nord tchadien dans les années 1970-1980.<br /></p>
<p>Aujourd'hui, la zone de peuplement touareg, qui couvre le sud de l'Algérie et de la Libye, l'ouest du Niger, l'est du Mali et le nord du Burkina-Faso, subit encore le contrecoup de la crise algérienne des années 1980-1990. A la lecture de cet ouvrage, on découvre à quel point une fraction importante de l'islam radical de cette région-ci a partie liée avec le pouvoir algérien, non l'officiel, le civil, celui du très affaibli Bouteflika, mais le vrai pouvoir, celui que détient une fraction de l'appareil militaire depuis des décennies ; un appareil militaire qui, comme au Maroc ou en Egypte, a la haute main sur une partie de l'économie nationale. Et en bonne bourgeoisie d'affaires, elle défend ses intérêts les armes à la main ! Pour les auteurs, il est prouvé depuis de longues années que derrière le sanglant Groupe islamique armé (GIA) se cachaient les services secrets algériens : ce sont eux qui ont formé le groupe (via des « déserteurs » de l'armée nationale ou des islamistes « retournés »), l'ont financé et dicté sa stratégie<strong>1</strong>. Le GIA a ainsi semé la terreur dans le nord du pays, notamment en Kabylie, territoire traditionnellement rebelle au pouvoir central, mais s'est abstenu de toute action dans la zone pétrolière saharienne qui, pourtant, est la principale source de financement du pouvoir, donc du lobby militaire. Former un groupe djihadiste avait au moins cinq fonctions pour le pouvoir algérien : il a permis de criminaliser l'islam radical légaliste, de lui faire concurrence dans la radicalité, d'entretenir un niveau de violence compatible avec le maintien de l'état d'urgence et donc la mise en suspens des libertés démocratiques, de se poser sur la scène internationale comme un rempart face à un Islam belliqueux... qu'il alimente en sous-main ; enfin, cette fraction de l'appareil politico-militaire se sert de l'épouvantail islamiste et de sa capacité de nuisance pour contrer les velléités d'autres clans de s'emparer du pouvoir donc de l'accès aux ressources. C'est ce GIA qui se transformera en Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) en 1998, puis en Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) en janvier 2007. Mais ne nous méprenons pas : si les émirs sont liés aux services secrets algériens, la base, elle, se compose d'islamistes radicaux, d'illuminés ou de jeunes désœuvrés.<br /></p>
<p>En se déplaçant dans cette zone sahélo-saharienne, ces groupes djihadistes téléguidés par une fraction de l'appareil politico-militaire algérien sont entrés en relation avec le mouvement touarègue qui, depuis cinquante ans, se bat pour sa survie culturelle, politique et économique. Un combat mené dans le désordre, tant les Touaregs sont passés maîtres dans l'art de s'allier puis de se désunir selon des logiques très difficilement maîtrisables par des non-touaregs, et sans oublier évidemment la capacité des services secrets algériens à segmenter le mouvement touareg<strong>2</strong>. Mais parler des Touaregs est réducteur : car ce sont toutes les populations du nord malien qui partagent avec les Touaregs une grande défiance à l'égard du pouvoir central et de ses appareils. Il n'est dès lors pas étonnant que le discours religieux radical proposé par les wahhabites et les salafistes trouvent des oreilles attentives dans des territoires de misère, d'autant plus que se faire rebelle (ou militaire) est l'une des rares voies de promotion sociale offerte à la jeunesse : « frustrations et humiliations deviennent l'ordinaire des comportements sociaux que n'importe quel entrepreneur de violence n'aura aucun mal à gérer. » (Bertrand Badie) N'oublions pas également que le processus de réislamisation du Mali est national et non local : au sud comme au nord, de nombreux musulmans se détournent des malékites et rejoignent les wahhabites, plus radicaux, offensifs... et riches, grâce au soutien de l'Arabie saoudite ; des wahhabites qui ont imposé en 2009 à un pouvoir déliquescent la création d'un ministère des Affaires religieuses.<br /></p>
<p>Mais derrière la lutte pour la dignité et le développement, il y a aussi tout le contrôle de la vie économique de cet espace transnational. Depuis des siècles, Sahel et Sahara sont des espaces de commerce licite et illicite évidemment indispensables aux populations locales. Depuis quelques années, au trafic de cigarettes s'est ajouté celui des armes et de la cocaïne latino-américaine. Mais on aurait tort de voir dans les groupes djihadistes des narco-guérillas ou des groupes politico-mafieux. S'ils en croquent, ils sont loin d'être les seuls : il est ainsi de notoriété publique que les gros trafics (comme la drogue) sont l'oeuvre de militaires et de politiciens affairistes des différents Etats de la zone<strong>3</strong>.<br />
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Mais si le Mali est tombé si bas, cela est la conséquence d'une conjonction d'événements : le printemps arabe qui a fragilisé des pouvoirs que certains estimaient insubmersibles, d'autant plus qu'ils se présentaient aux yeux des Occidentaux comme les seuls en mesure de contenir l'islamisme radical ; le renversement de Mouammar Kadhafi qui a entraîné le retour au nord-Mali de combattants touaregs lourdement armés servant jusque là dans l'armée libyenne ; la déliquescence totale de l'Etat malien (et de son armée), rongé par la corruption, l'affairisme, le clientélisme, la gabégie.<br /></p>
<p>L'intervention française est-elle de nature à raffermir l'Etat malien, de le remettre sur de bons rails ? Rien n'est moins sûr<strong>4</strong>. Ce qui se dessine, pour Michel Galy, est la mise sous tutelle de l'Etat malien comme au bon vieux temps de la Françafrique (il parle de « processus de recolonisation qui n'ose pas dire son nom »), avec un président démocratiquement élu, donc légitime pour passer des accords de défense permettant à la France et à l'ONU de maintenir des troupes capables de mener sur le long terme la croisade contre le djihadisme. Un djihadisme qui se nourrit de frustration, de misère, de corruption, d'élections truquées... Pour lui, « la reprise par un gouvernement socialiste de la rhétorique de la « guerre au terrorisme » sonne comme une capitulation idéologique et témoigne d'une incapacité à prendre en considération la base sociale des mouvements militaro-religieux et, par conséquent, à envisager des alternatives possibles à l'action armée. » Les gouvernements changent, mais la politique africaine de la France, elle, ne varie pas...<br />
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Notes :<br />
1. Lire à ce sujet <em>Chronique des années de sang</em>, témoignage du colonel-déserteur Mohammed Samraoui.<br />
2. Alors que le MNLA (Mouvement national de libération de l'Azawad) a le soutien de la Mauritanie, Ansar Eddine, dirigé par Iyad Ag Ghali, a quant à lui celui de l'Algérie qui soutient également le MUJAO (Mouvement pour l'unicité et le djihad en Afrique de l'Ouest) une soi-disant scission d'AQMI. Derrière chaque organisation, il y a donc un « parrain » mais aussi un bassin « ethnique » de recrutement : plutôt touareg pour Ansar Eddine, plus large (songhaï et peulh) pour AQMI et le MUJAO.<br />
3. Selon Judith Scheele, « ce commerce demande une organisation sophistiquée et transnationale à laquelle les transporteurs sahariens ne participent que de manière marginale et subalterne » (in <em>Trafic ou commerce ? Des échanges économiques au Sahara contemporain</em>, CERI, 2013).<br />
4. Cet ouvrage est sorti avant la tenue des élections présidentielles qui ont vu la victoire de Ibrahim Boubacar Keita (alias IBK), un cacique « de gauche » de la scène politique malienne. Au premier tour, il y avait plus de 20 candidats à se présenter devant les électeurs...</p>Xavier Montanya, L'or noir du Nigeriaurn:md5:d662e8ac202c1416ffd1f53758ea54a02012-09-14T22:13:00+01:00PatsyNotes de lectureAfriqueCapitalismeEcologie<p><strong>Xavier Montanya</strong><br />
<em>L'or noir du Nigeria – Pillages, ravages écologiques et résistances</em><br />
Agone, 2012<br />
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Tous les géants n'ont pas les pieds d'argile. Le Nigeria est un géant d'Afrique dont on a cent fois prédit l'implosion<strong>1</strong>. Pourtant cet Etat fédéral tient. Il tient par la corruption, la violence, le clientélisme, en joint-venture avec quelques multinationales, véritables Etats dans l'Etat.<br />
Xavier Montanya, journaliste catalan auteur d'un excellent livre sur la résistance chilienne<strong>2</strong>, a enquêté cinq années durant au pays du <em>light sweet crude oil</em><strong>3</strong>, et prouve encore une fois que le pétrole, cette « merde du diable », ne fait pas le bonheur<strong>4</strong>.</p> <p><img src="http://patsy.blog.free.fr/public/.Montanya_s.jpg" alt="Montanya.jpg" style="display:block; margin:0 auto;" title="Montanya.jpg, sept. 2012" /><br />
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Bienvenue dans le delta du Niger, là où il fait toujours clair puisqu'on y fait brûler le gaz 24 heures sur 24 au mépris de la santé humaine, là où l'on patauge dans l'or noir du fait des déversements « accidentels » ou criminels<strong>5</strong>. Ici règnent les multinationales et leurs hommes de main, ces compagnies de sécurité privée formés de mercenaires et d'anciens militaires qui assistent les forces armées gouvernementales dans le maintien de l'ordre. Car de l'ordre il en faut pour contenir une population qui n'en peut plus, refuse de crever sur place sans rien dire et trouve à l'occasion le chemin de la révolte pour clamer son droit à vivre en sécurité. En réponse, le gouvernement liquide des opposants, comme Ken Saro-Wiwa<strong>6</strong>, en emprisonne d'autres, en achète aussi, à l'occasion. L'impunité est totale. Et si cela ne suffit pas, les sectes évangéliques qui pullulent sur le désespoir et la misère sont là pour vendre du rêve et de la soumission. On en compte des dizaines. La religion est un business comme un autre...<br /></p>
<p>Le delta du Niger est une zone de guerre où s'affrontent armée fédérale et bandes armées, où sévissent milices privées (liées notamment à des politiciens locaux), pirates et groupes criminels ; c'est une zone de non-droit où l'Etat central et les grandes compagnies essaient de monter les communautés les unes contre les autres pour assurer leur hégémonie. Et ils ne manquent pas d'alliés. En 2009, François Fillon avait proposé que la France assure « la formation d'unités nigérianes » pour les rendre plus opératoires sur le terrain ; et d'autres, comme Zapatero et Medvedev, lui ont emboîté le pas. La « défense des intérêts de la Françafrique » méritent bien quelques cadavres, non ?<br />
Le delta du Niger, terre de mangroves, est une zone écologiquement saccagée dont les eaux et les terres arables sont souillées, et pour longtemps. Shell (dont les installations occupent la moitié de la surface du delta) et consorts entendent maximiser leurs profits et n'ont que faire de sauvegarder un écosystème fragile. Après eux, le déluge.<br /></p>
<p>« Cette merde a tout barbouillé, jusqu'au plus profond de l'âme ». Voilà ce qu'a dit à Xavier Montanya, un vieux pêcheur de Goi, un village sinistré par une marée noire « accidentelle ». <br />
A l'heure où la multinationale anglo-hollandaise, chassée du pays ogoni par la mobilisation populaire, tente de se refaire une virginité<strong>7</strong>, préalable à son retour sur ce territoire, il est plus que nécessaire de lire ce livre. Car, malgré la violence et la répression (le quart du budget de l'Etat fédéral est consacré à la « sécurité »), les jeux politiciens et l'instrumentalisation des questions « ethniques » et « religieuses », des hommes et des femmes continuent à se battre, sans relâche, pour sauver ce qui peut l'être encore de leur delta... <br />
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<strong>Notes</strong> :<br />
1. Le nord du pays, où se font face chrétiens et musulmans, s'enflamme périodiquement. Dans le delta, zone pétrolière de premier plan, les conflits socio-politiques (qu'on qualifie trop facilement d'« ethniques ») sont légion.<br />
2. <a href="http://atheles.org/agone/memoiressociales/lesderniersexilesdepinochet/">''Les derniers exilés de Pinochet''</a>, Agone, 2009.<br />
3. Autrement dit, le Nigeria regorge d'un pétrole brut et léger très recherché par les multinationales car plus facile à travailler que d'autres.<br />
4. Lire à ce propos, Luis Martinez, <em>Violence de la rente pétrolière – Algérie, Irak, Libye</em>, Presses de Sciences Po, 2010.<br />
5. Le <em>gas flaring</em> (rejet du gaz brûlé dans l'atmosphère) est interdit depuis 1984 (sauf autorisation ministérielle) mais il se pratique systématiquement ici. Les déversements accidentels sont liés à des sabotages (qui alimentent le marché parallèle), mais tout aussi souvent à l'absence d'entretien des oléoducs et au peu d'intérêt (énorme euphémisme !) porté par les multinationales aux questions d'environnement.<br />
6. Lire Ken Saro-Wiwa, <em>Si je suis encore en vie... - Journal de détention</em>, Stock, 1996. Ken Saro-Wiwa a été pendu avec huit autres militants ogonis le 10 novembre 1995. Militant non-violent, il était accusé d'avoir fait tuer quatre politiciens ogonis proches de Shell.<br />
7. Pour éviter un procès public aux Etats-Unis, Shell a proposé en 2010 de verser 15 millions de dollars aux familles des neuf victimes. Celles-ci ont accepté...<br />
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<strong>Cette note a paru dans le n°227 (février 2013) de Courant alternatif</strong></p>La prodigieuse procession et autres chargesurn:md5:ef259bb2c4ff50a7d351a80217ff444a2011-09-22T21:02:00+01:00PatsyNotes de lectureAfriqueEtats-Unis<p><strong>Mark Twain</strong><br />
<em>La prodigieuse procession et autres charges</em><br />
<a href="http://atheles.org/agone/manufacturedeproses/laprodigieuseprocessionautrescharges/index.html">Agone</a>, 2011, 322 p.<br />
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<img src="http://patsy.blog.free.fr/public/Mark_Twain.jpg" alt="Mark_Twain.jpg" style="display:block; margin:0 auto;" title="Mark_Twain.jpg, sept. 2011" /></p> <p>En publiant cet ouvrage, Agone exhume une facette méconnue de Samuel Lanhorne Clemens (1835-1910), alias Mark Twain. Car celui qui devînt célèbre, riche et honoré, en contant les aventures de deux enfants rebelles des rives du Mississippi, savait également plonger sa plume dans le vitriol pour dénoncer le monde de son temps.<br />
« La prodigieuse procession et autres charges » comprend une vingtaine de textes. Qu'y a-t-il dans le viseur du créateur de Tom Sawyer et Huckleberry Finn ? Le racisme anti-chinois, la lâcheté collective au visage du lynchage, l'impérialisme et son complice, la religion. Certains textes méritent à eux-seuls la lecture de ce livre. Je pense notamment au remarquable « Soliloque du Roi Léopold » (1905) justifiant la conquête et la mise en exploitation du Congo par la violence la plus effroyable<strong>1</strong>, au « Soliloque du Tsar » écrit la même année, ou encore à deux textes aussi courts que cinglants sur le patriotisme, « ce mot grotesque et risible ». Sans oublier cette « Prodigieuse procession », texte inédit de 1901 dans lequel Mark Twain dépeint le Vingtième siècle naissant de sa plume assassine. <br /></p>
<p>Vingt textes donc, dont une poignée, les plus virulents, fut publiée post-mortem, à la demande de l'auteur. Car on aurait tort de faire de Mark Twain un rebelle. Comme le soulignent préfacier et traducteur, sa « dissidence » fut contrôlée : Twain n'entendait pas que ses convictions politiques n'en viennent à remettre en question sa carrière et sa notoriété ; ce qui fit écrire à Orwell qu'il n'était rien d'autre qu'un « bouffon agréé ». De fait, Twain se conformait à l'image qu'il se faisait des Américains : « Dans notre pays, nous jouissons de trois choses parmi les plus précieuses qui soient : la liberté de parole, la liberté de conscience, et la grande prudence de ne pas les exercer. »<br />
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<strong>Notes</strong>
<strong>1.</strong> Sur le Congo et le roi des Belges, lire Adam Hochschild, <em>Les fantômes du roi Leopold – Un holocauste oublié</em>, Belfond, 1998.<br />
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<strong>Cette note a trouvé place dans le numéro de décembre 2011 de <a href="http://oclibertaire.free.fr/">Courant alternatif</a></strong></p>Démocratie : la preuve par Cotonou ?urn:md5:3c0ff69b6f57e5db6317ff4c6ea129392011-01-09T13:02:00+00:00PatsyActualité internationaleAfriqueBéninDémocratie bourgeoise<p><strong>Chronique n°10 (janvier 2011)</strong><br />
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Fin novembre, les urnes rendent leur verdict du côté d'Abidjan. Alassane Ouattara l'emporte devant le président sortant, Laurent Gbagbo. Aussitôt celui-ci refuse de céder son poste et essaie d'imposer un nouveau comptage des voix, au risque de plonger le pays dans la guerre civile. En jeu : le pouvoir, donc l'argent, puisque l'un ne va pas sans l'autre.<br />
Mi-décembre, du côté de Minsk, Alexandre Loukachenko emporte haut la main les élections présidentielles. Les élections étaient très bien organisées, rassurez-vous. Tellement bien qu'on se demande pourquoi des opposants sérieux légitiment cette mascarade en se présentant aux suffrages des citoyens, puis en contestant le résultat tant celui-ci était attendu. En jeu : le pouvoir, donc l'argent, puisque l'un ne va pas sans l'autre.<br />
Alors que de très nombreuses élections donnent lieu à des contestations, il n'en est rien au Bénin. Depuis vingt ans, l'ex-Dahomey fait figure de modèle. <br /></p> <p>En 1990, Mathieu Kérékou, président de la République populaire du Bénin depuis 1972 et colonel de profession, cède le pouvoir. Un an auparavant, le bloc de l'Est a implosé et le marxisme-léninisme n'est plus de saison. Les « forces vives de la Nation » se retrouvent au sein d'une conférence nationale pour y travailler sur une nouvelle constitution et l'organisation d'un prochain scrutin présidentiel. Celui-ci se tient en mars 1991 et est remporté par Nicéphore Soglo<strong>1</strong>, un haut fonctionnaire de la Banque mondiale. <br />
En 1996, de nouvelles élections libres se tiennent et voient le retour au pouvoir de Mathieu Kérékou qui parviendra même à remporter le scrutin suivant, en mars 2001, avant de céder finalement son poste<strong>2</strong> en mars 2006 à Thomas Yayi Boni, un technocrate ancien président de la Banque ouest-africaine de développement.<br />
En vingt ans, les Béninois se seront donc rendus quatre fois dans l'isoloir pour élire leur président. Des élections libres, compétitives qui ont donné lieu globalement à peu de contestations. Bref, le Bénin est un exemple pour toute l'Afrique : la démocratie bourgeoise, ça marche ! C'est la preuve par Cotonou !<br />
Il est donc intéressant de voir comment ce « miracle » peut exister, pourquoi diable la classe politique béninoise ne s'étripe pas à la première occasion, n'est pas dans une logique perpétuelle d'affrontements violents mais accepte de façon générale le jeu démocratique avec ses joies et ses peines, ses récompenses et ses traversées du désert.<br /></p>
<p>On s'aperçoit alors que depuis la transition démocratique de 1990-1991, tous les leaders politiques « ont à un moment ou à un autre de leur carrière occupé une position centrale ». En vingt ans, ils sont devenus soit président de la République, soit ministre d'Etat, soit président de l'assemblée nationale. <br />
On note également que la classe politique béninoise sait nouer des alliances politiques souvent fort surprenantes. Ainsi, Adrien Houngbédji fut un opposant historique de Kérékou (qui l'avait condamné à mort en 1976) avant de devenir son ministre à partir de 1996. On pourrait dire la même chose à propos de la Côte d'Ivoire puisque Ouattara s'est allié à Konan Bédié pour chasser Gbagbo du pouvoir, alors que c'est ce même Konan Bédié qui a mis le pays sur la voie de la guerre civile en 1995 en contestant la qualité d'Ivoirien de Ouattara afin de l'empêcher de briguer la présidence ! Décidément, certains n'ont pas la rancune tenace. <br />
Derrière chaque leader béninois, il y a un parti, autrement dit une machine électorale. On en compte actuellement un peu plus d'une centaine ! Chaque élection voit ces partis s'unir et se désunir, l'essentiel étant de miser sur le bon cheval, de constituer la meilleure alliance électorale, celle qui permet d'arracher des postes de ministres ou de députés. Et puis, on a l'esprit nomade au Bénin : on change de monture, on monnaye sa voix. Cela explique en partie pourquoi les remaniements ministériels y sont si nombreux et les équipes ministérielles aussi pléthoriques. Le gouvernement Yayi Boni est ainsi passé de 22 membres à sa création en mars 2006 à 30 membres en 2010, après quatre remaniements. Parmi ces ministres, on notera la présence de Ganiou Soglo, fils de Nicéphore Soglo, et de Modeste Kérékou, fils de Mathieu. Car la politique au Bénin est affaire de famille. On se passe le flambeau de père en fils, l'essentiel étant d'occuper le terrain des affaires. <br /></p>
<p>Les Béninois ne sont évidemment pas dupes de la façon dont fonctionne la « démocratie béninoise ». Ils savent que celle-ci est entre les mains d'une classe politique corrompue, prédatrice, qui fait son beurre et ses affaires sous le couvert de l'intérêt général. Ils ne croient pas aux partis. J'en veux pour preuve que Nicéphore Soglo en 1991, Mathieu Kérékou en 1996 et Yayi Boni en 2006 sont devenus présidents de la République en se présentant comme des candidats libres, sans attache partisane, même s'ils étaient soutenus par des coalitions hétéroclites de partis. <br /></p>
<p>L'établissement de la démocratie n'a donc en rien atténué les pratiques prédatrices des élites qui se succèdent au pouvoir, ni mis un frein à la pauvreté endémique qui frappe près de la moitié de la population béninoise. <br />
En Côte d'Ivoire, Laurent Gbagbo s'accroche au pouvoir parce qu'avoir la main sur l'Etat signifie que l'on a la main sur le commerce extérieur ivoirien, autrement dit sur le cacao et le café, que l'on peut donc s'enrichir, s'acheter des alliés, une clientèle. <br />
Au Bèlarus, Alexandre Loukachenko s'accroche au pouvoir parce qu'il a mis en place depuis son entrée en fonction en 1994 tout un système qui fait de la présidence de la République un acteur économique de premier plan tenant les secteurs les plus dynamiques de l'économie nationale. <br />
Au Bénin, on ne s'accroche pas au pouvoir, on attend son tour tout simplement parce qu'on a la quasi-certitude d'obtenir un jour une part du gâteau national. Il suffit pour cela de miser sur le bon cheval.</p>
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<p><strong>Notes</strong><br />
1. F. Eboussi Boulaga,<em> Les conférences nationales en Afrique noire – Une affaire à suivre</em>, Karthala, 1993. <br />
2. La Constitution lui interdisant de se représenter.<br /></p>
<p><strong>A lire</strong> <br />
Cédric Mayrargue, « Yayi Boni, un président inattendu ? Construction de la figure du candidat et dynamiques électorales au Bénin », in <em>Politique africaine</em> n°102 (06/2006)</p>Coupe du monde : des anarchistes sud-africains s'exprimenturn:md5:bf07001151edb51b278a0da1a0b7ed792010-06-17T12:13:00+01:00PatsyActualité internationaleAfriqueCapitalismeNationalisme<p><strong>Emission n°33 (juin 2010)</strong><br />
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Pour le Front anarchiste-communiste Zabalaza sud-africain, il n’est pas question de participer à la liesse populaire provoquée par la Coupe du monde 2010. Dans un très long communiqué, il s’en prend au discours du gouvernement Zuma qui présente cet événement comme une opportunité unique pour l’Afrique du sud d’améliorer les conditions de vie de sa population. Pour les libertaires sud-africains, cette opportunité « été et continue d'être celle de la gloutonnerie frénétique de l'élite dirigeante sud-africaine comme du capital national ou global. »</p> <p>Pour accueillir la Coupe du Monde, le gouvernement a dépensé près de 85 millions d'euros pour le développement des infrastructures et de stades qui ne seront plus jamais remplis après. C'est une immense gifle au visage de tous ceux qui vivent dans un pays marqué par une extrême pauvreté, et un chômage de près de 40%. Au cours des cinq dernières années, les travailleurs pauvres ont exprimé leur indignation et leur déception face à l'incapacité du gouvernement à corriger les inégalités sociales massives, organisant dans tous le pays plus de 8000 manifestations pour exiger aussi bien des logements que l’accès à l’eau, à l’électricité ou à la santé.<br /></p>
<p>L'Afrique du Sud a désespérément besoin d'infrastructures publiques de grande échelle, en particulier dans le domaine du transport public qui est presque entièrement absent dans certaines villes, notamment à Johannesburg. Le lancement du « Gautrain », sorte de RER local le mardi le 8 juin, à la veille de l’ouverture de la coupe du monde n’est en rien une réponse à ce problème : dans un pays où la grande majorité des habitants dépend pour ses transports quotidiens de longue distance des taxis/mini-bus privés sans aucune condition de sécurité, le Gautrain offre grande vitesse, transport de luxe pour les touristes et pour ceux qui voyagent entre Johannesburg et Pretoria, soit 54 kms ? Mais qui peut se l'offrir, quand un simple aller entre l'aéroport et le centre d’affaires de Johannesburg] coûte déjà 10 euros (pour rappel, le salaire moyen des salariés est de 570 euros)<br /></p>
<p>La compagnie des Aéroports d'Afrique du Sud (ACSA) a dépensé plus de 1,6 millions d'euros pour la mise aux normes des aéroports. L'Agence nationale des routes sud-africaine, privatisée, a dépensé plus de 2,3 millions pour un nouveau réseau de routes à péage... Tout cela justifiera la mise en œuvre de mesures d'austérité drastiques pour récupérer les millions dépensés dans ces infrastructures dont la plupart sont d'un intérêt nul pour les Africains du sud pauvres qui représentent l’écrasante majorité du pays. <br />
Partout dans le pays, les municipalités se sont embarquées dans des schémas de rénovation urbaine... accompagné de leurs inséparables programmes de « gentrification », le gouvernement tentant hâtivement de cacher sous le tapis la réalité de l'Afrique du Sud. A Johannesburg, ce sont plus de 15 000 sans abri et autres enfants des rues qui ont été raflés et jetés dans des « abris » ; au Cap la municipalité a expulsé des milliers de personnes des zones pauvres et des camps de squatters dans le cadre du projet « World Cup vanity » (« rendre la ville coquette pour la coupe du monde »). La ville de Cape Town a tenté - en vain - d'expulser de leurs maisons les 10 000 résidents du bidonville Joe Slovo afin de les soustraire au regard des touristes voyageant le long de l'autoroute N2. Ailleurs il y a eu des déportations pour faire place à des stades, à des parkings pour les touristes, ou à des gares. A Soweto, les routes sont embellies le long des itinéraires touristiques et ceux de la FIFA (fédération internationale de foot), tandis que les écoles adjacentes exhibent toujours leurs fenêtres cassées et leurs bâtiments en ruine.<br /></p>
<p>Et que dire du déluge de propagande nationaliste ! Le vendredi a été déclaré « journée du foot ». La « nation » est encouragée (et les écoliers forcé) à porter le t-shirt de l'équipe nationale. Les voitures sont affublées de drapeaux, les gens apprennent la "diski-danse", et il est de rigueur d'acheter les poupées représentant la mascotte Zakumi. Quiconque ose exprimer un doute, critiquer ce battage est traité d’antipatriote : l'exemple le plus significatif a été l'appel lancé aux grévistes du Syndicat des transports (SATAWU) d'abandonner leurs revendications « dans l'intérêt national ». Dans un contexte où près d'un million d'emplois ont été perdus au cours de la seule dernière année, les déclarations du gouvernement sur la création de plus de 400 000 emplois par la coupe du monde sont insultantes. Ces emplois sont le plus souvent précaires et tenus par des travailleurs non-syndiqués et rémunérés très en dessous du salaire minimum.<br /></p>
<p>En dehors de la répression contre les syndicats, les mouvements sociaux ont reçu la même hostilité de l'État, qui a officieusement interdit toute protestation pendant la durée de l'événement. Une enquête menée auprès des municipalités accueillant la Coupe du monde a révélé qu'une interdiction générale de tout rassemblement est en cours. Le conseil municipal du Cap a indiqué qu'il continuerait de recevoir les demandes pour l'organisation de manifestations, mais a indiqué que « cela pourrait être un problème » pendant la période de la Coupe du Monde. <br /></p>
<p>La constitution sud-africaine, souvent salué pour son caractère « progressiste », est donc loin de garantir la liberté et l'égalité. Cette nouvelle forme de répression est clairement en contradiction avec le droit constitutionnel à la liberté d'expression et de réunion. Toutefois, les mouvements sociaux à Johannesburg, dont le Forum anti-privatisation et plusieurs autres n'ont pas renoncé si facilement. Ils ont obtenu une autorisation pour une marche de manifestation le jour même de l'ouverture, avec l'aide de l'Institut pour la liberté d'expression (Freedom of Expression Institute). Toutefois, la marche devra se tenir à trois kilomètres du stade…
Le gouvernement sud-africain a trouvé un partenaire idéal avec la FIFA de Sepp Blatter. Une FIFA qui escompte de la coupe 2010 des retombées financières de l’ordre d’1,5 millions d'euros… en sachant qu’elle a déjà gagné plus de 1 million d'euros en vendant les droits de retransmission télé.<br /></p>
<p>Les stades et les zones autour des stades, qui ont été remis à la FIFA pour la durée du tournoi sont des « cocons libres d'impôt ». Les routes et les points d'accès ont été débarrassée de toute personne vendant des produits sans licence et de tous ceux qui essaient de joindre les deux bouts dans les camps de squatters autour des routes de l'aéroport. Ainsi, ceux qui comptaient sur leurs ventes lors de la Coupe du monde pour augmenter leur revenu de survie sont écartés. La FIFA, propriétaire exclusif de la marque « Coupe du Monde » et de ses produits dérivés, dispose d'une équipe d'une centaine d'avocats qui éclusent le pays pour traquer toute vente non autorisée de ces produits et pour surveiller la commercialisation de la marque. Les produits illégaux sont saisis et les vendeurs sont arrêtés. Les journalistes ont également été efficacement bâillonnés : leur accréditation officielle inclue une clause les empêchant de critiquer la FIFA.</p>
<p>Constructions de camps de squatters temporaires aux portes mêmes des stades, manifestations massives, grèves… nombreux sont ceux qui continuent le combat et font entendre leurs voix en dénonçant publiquement les inégalités terribles qui caractérisent la société sud-africaine.</p>Pasqua : un parfum d'Afriqueurn:md5:aa7b6a2fd114ee50f8ba48bf630cb8362010-05-05T18:01:00+01:00PatsySociétéAfriqueDémocratie bourgeoise<p><strong>Emission n°28 (mai 2010)</strong><br /></p>
<p>J'imagine que vous fûtes, comme moi, soulagés en apprenant la quasi-relaxe de ce gaulliste historique de Charles Pasqua qui a tant fait pour le rayonnement de la France et de la Corse. J'imagine que vous fûtes, comme moi, outrés en apprenant que la clémence du tribunal était dû à l'âge du capitaine et à sa carrière au service de l'Etat. Soulagés, outrés... je plaisante évidemment.</p> <p>Je pourrais vous parler des « affaires » et autres péripéties qui ont marqué les dernières années de Charles Pasqua et dont certaines ont fait l’objet de procès. Je pourrais vous parler du SAC, du Service Action civique, célèbre structure politico-barbouzarde dans laquelle notre homme baigna pendant dix ans, de 1959 à 1969, avec le discret Jacques Foccart, éminence grise du général, spécialiste en coups tordus, notamment en Afrique. Et justement, c’est d’Afrique dont j’aimerais vous parler, parce que Charles Pasqua y joua un rôle non négligeable.<br /></p>
<p>Les relations franco-africaines depuis les dites Indépendances sont marquées par trois phénomènes. Tout d’abord, il y a une grande continuité entre les politiques menées par de Gaulle et tous les régimes qui se sont succédé ; la victoire de François Mitterrand en 1981 n’a changé en rien la nature de ces relations. Ensuite, il y a une très grande personnalisation des relations : la politique africaine de la France demeure entre les mains du Président de la République ; c’est sa chasse gardée. On peut se gausser de cela, mais il n’en demeure pas moins que les relations entre l’Etat français et la plupart des anciennes colonies sont singulières et bien différentes de ce que l’on retrouve d’ordinaire sur la scène internationale. Il y a enfin et surtout le poids du clientélisme et des réseaux : la politique gaullienne a consisté à installer au pouvoir, au moment des Indépendances, des régimes autoritaires. L’Etat français s’est donc constitué un réseau d’Etats-clients vivant par et de la corruption. C’est Jacques Foccart qui a mis en place ces réseaux économico-politiques (pour ne pas dire mafieux) capables à la fois de « nourrir » les entreprises françaises faisant leur beurre en Afrique (en empêchant l’installation d’investisseurs anglophones par exemple) et d’assurer à la cinquième république une camarilla d’Etats « indépendants » mais capables de la soutenir à l’ONU. Avec l’arrivée de la gauche au pouvoir, ces réseaux ont été « réorganisés », les réseaux gaullistes cédant un peu de leur pouvoir aux nouveaux réseaux mitterrandiens. <br /></p>
<p>Charles Pasqua fut l’un des acteurs de ce système françafricain dans les années 1980, épaulé par des personnages aussi respectables que Didier Schuller ou le préfet Marchiani. Inutile d’évoquer ici les frères Feliciaggi, honnêtes commerçants comme il se doit… même si l’un d’eux, Robert, a été assassiné en 2006. Inutile également d’évoquer Pierre-Philippe Pasqua, le fils, apôtre de l’amitié entre les peuples, comme son papa. Comme notre président. Car ne l’oublions pas, Nicolas Sarkozy est une sorte d’héritier de Charles Pasqua ; un héritage qui dépasse largement les Hauts-de-Seine. Certes, ils se sont faits quelques coups bas mais ils ont toujours su trouver les ressources pour rebondir. Et puis Nicolas, qui déclarait en 1983 que Charles Pasqua était « l’un des hommes les plus honnêtes » qu’il connaissait a toujours su s’entourer : j’en veux pour preuve la nomination de Claude Guéant, ancien directeur général de la Police nationale quand Pasqua était ministre de l’Intérieur, au poste de secrétaire général de l’Elysée depuis mai 2007.<br /></p>
<p>Bref, comme il est de coutume en terres françafricaines, on prône régulièrement la « rupture », le « changement », la « nouvelle approche ». Tout changer pour que rien ne change, en somme. Nicolas Sarkozy a joué le même sketch à Dakar. Mais bon, comme le disait si bien son mentor à l’accent chantant de Corse : « Les promesses des hommes politiques n'engagent que ceux qui les reçoivent ». On ne saurait être plus clairs.</p>