Le Monde comme il va - Actualité politiqueLe Monde comme il va, magazine anticapitaliste et libertaire, était une émission de radio hebdomadaire diffusée tous les jeudis à partir de 19h10 sur Alternantes FM, entre janvier 1999 et juin 2011. L'émission hebdomadaire a été remplacée par une chronique hebdomadaire diffusée chaque vendredi matin à 7h55 dans le cadre des Matinales d'Alternantes FM, toujours !2024-03-24T21:48:22+01:00Patsyurn:md5:18ad09a0b93313ed3ffae6b27434a016DotclearMénard et les cacas des chiens : attention subversion !urn:md5:e641dfe7b203f616cdaa4ee1cc29350e2016-05-24T21:16:00+01:00PatsyActualité politique <p>Il est évidemment fort désagréable de souiller son escarpin et sa basket avec de l'excrément de Pékinois, abandonné là au beau milieu d'un trottoir. Quand je parle de Pékinois, je parle évidemment du chien et non du ressortissant de la capitale chinoise. Vous me direz que cette précision était inutile puisqu'il y a peu de chances qu'un ressortissant de l'Empire du milieu ne dépose sa crotte à la vue de toutes et tous, sur un trottoir français. Mais voilà, dès qu'il s'agit de Béziers, la ville de l'ineffable Robert Ménard, il vaut mieux être précis, l'ancien journaliste, défenseur de la veuve et de l'orphelin du temps de Reporters sans frontière, étant un obsessionnel du fichage ethnique. Est-il dans les habitudes chinoises de faire ses besoins dans la rue ? Allez savoir… et c'est peut-être en cela que réside l'intérêt des statistiques.<br />
La dernière obsession de Robert Ménard ne concerne pas les nègres, arabes, voleurs de poules et autres pas-blancs peuplant nos villes et nos campagnes mais les cacas de canidés ; des chiens qui font là où ils veulent, au mépris des convenances. Je ne sais combien de personnes âgées glissent sur les étrons et se cassent le col du fémur, mais j'imagine qu'il doit y avoir un lien statistique entre cette constatation et le fait qu'à partir d'octobre prochain, tous les propriétaires de chiens du centre-ville seront tenus sous peine d'amende de faire ficher leurs chiens ; s'ils refusent, la douloureuse se montera à 38 €. Grâce à un « kit caca » offert par la mairie, les vétérinaires pourront ainsi prélever de quoi déterminer l'ADN des toutous du centre-ville. Dans la foulée, une brigade spéciale sera chargée du ramassage des crottes et de la recherche du délinquant à poil normalement présent dans le fichier des clébards ADN-isés. Il en coûtera 450 € au propriétaire du chien, fiché ou non, reconnu coupable d'avoir fait son caca là où il ne le fallait pas.<br />
L'avenir dira si cette initiative forte aura pour conséquences une recrudescence des abandons de chiens dans le centre-ville de Béziers, une montée en flèche de la délation, voire même de terribles règlements de compte entre voisins. Imaginez qu'un bon citoyen ramasse les crottes de son chien, les jette dans une poubelle municipale, et qu'un de ses ennemis ou un plaisantin douteux ne les en retirent pour, nuitamment, la déposer au milieu d'un trottoir afin qu'elles soient ramassées, analysées par la « Brigade environnement » ; tout cela dans le but d'incriminer un bon et honnête citoyen qui ne pourra alors que plaider sa bonne foi, qu'exhiber les sacs à caca qu'il achète par paquet de cent pour ramasser l'étron canin ! Imaginez même qu'un groupe séditieux se décide à ramasser des crottes fraîches hors de la zone concernée pour venir les déposer en masse au coeur de la ville ? La brigade environnement risquerait ainsi de se retrouver submergée de cacas inconnus émanant de chiens non répertoriés pour ne pas dire clandestins. Non, je n'ose imaginer...</p>Socialisme d'hier = libéralisme d'avant-hierurn:md5:1e842400727ff3f315c9f5494c996ba92016-03-29T20:46:00+01:00PatsyActualité politique <p>Le hasard a voulu que je tombe mardi 22 mars sur un document d’une vingtaine de pages, vieux de plus de vingt ans et pourtant d’une extraordinaire actualité. Ecoutez plutôt :
« Il nous faut donner un nouvel esprit aux lois. Passer de la réglementation à la régulation et déplacer les frontières de l’ordre public, c’est-à-dire exiger de la loi qu’elle fixe les principes et les règles essentielles et faire confiance aux acteurs sur le terrain pour mettre en place les procédures et les organisations adaptées. La loi ne doit pas réglementer la mise en œuvre, mais fixer les interdits et révéler les possibles.<br />
Cette conception nouvelle du rôle de la loi doit passer par une simplification du code du travail, en freinant la production de nouveaux textes, en revisitant les textes existants pour mettre à jour les redondances ou les mesures contradictoires, en simplifiant l’empilage des textes qui s’est progressivement construit entre le code du travail, les conventions collectives, les accords de branche et les accords d’entreprise.<br />
L’objectif serait d’arriver à un code du travail simplifié et recodifié en 50 à 100 articles maximum. Une commission spécialisée, composée de chefs d’entreprise et de juristes, pourrait être créée à cet effet.<br />
En contrepartie, les entreprise, quelle que soit leur taille, auraient obligation de mettre en place un dialogue social et de la faire vivre sur tous les sujets relatifs à la vie de l’entreprise.<br />
Ainsi pourrait s’engager une responsabilisation de tous les acteurs à leur niveau et l’entrée dans une société de la négociation et du contrat. »<br /></p>
<p>Qui parlait ainsi en l’an de grâce 1995 ? Le jeune Macron ? Le moins jeune Valls ? Nicole Notat peut-être ? Vous n’y êtes pas. Il s’agit du Centre des jeunes dirigeants d’entreprise (CJDE). J’ai trouvé ce texte dans l’un de leurs rapports intitulé : « Vers l’entreprise à la carte – Une entreprise flexible, économiquement performante, qui redonne à chacun une place dans l’emploi ».<br />
Dans ce texte, tout y est : le classique rejet de l’étatisme et du bureaucratisme, la simplification du code du travail considérée comme une usine à gaz non-maîtrisable par les acteurs sociaux, la nécessité de revivifier le dialogue social au plus près du terrain et des réalités de l’entreprise.<br />
Ah le dialogue social ! Le patronat adore ça, il le met à toutes les sauces ! Mais dans la réalité, on le sait tous, il en va différemment. Un syndicat, c’est fait pour acquiescer, pour négocier à la marge, sinon il est néfaste et il ne sert à rien !<br />
J’ai particulièrement apprécié le passage dans lequel nos patrons modernistes parlent de la nécessaire simplification du code du travail. Rappelez-vous : « L’objectif serait d’arriver à un code du travail simplifié et recodifié en 50 à 100 articles maximum. Une commission spécialisée, composée de chefs d’entreprise et de juristes, pourrait être créée à cet effet. » N’est-ce pas merveilleux de les voir parler de dialogue social d’un côté et d’oublier de l’autre d’associer les organisations syndicales à la refonte du code du travail dont la fonction, nous disent les juristes, est de régir les relations humaines qu’engendre le travail subordonné ? Je vous laisse juge.</p>Les Verts, radis contemporainsurn:md5:7a3a6b2026d7645b81ff9938ff3a77052016-02-22T17:23:00+00:00PatsyActualité politique<p><strong>Nouvelle donne, vieilles rengaines n°10 (février 2016)</strong><br />
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Sous la troisième république, histoire de se gausser de l'opportunisme politique du Parti radical, on comparait ses membres aux radis : rouges à l'extérieur, blancs à l'intérieur et toujours près de l'assiette au beurre. Rouges à l'extérieur parce que nos radicaux, laïcs fervents, prétendaient défendre le peuple travailleur. Blancs à l'intérieur parce que nos radicaux, en bons bourgeois modernistes, ne songeaient nullement à remettre en cause le système capitaliste. Toujours près de l'assiette au beurre, parce qu'on pouvait toujours compter sur eux pour former des alliances électorales et intégrer des ministères.</p> <p>Les Verts sont les radicaux des temps contemporains. On peut compter sur eux pour donner la patte et se faire caresser l'encolure après s'être fait rosser. Tragique destin que celui de ce parti qui prétendait renouveler le jeu politique et qui n'a fait qu'en reproduire les aspects les plus grotesques avec ses chamailleries entre pseudo-tendances qui ne sont souvent que de vraies coteries, autour d'un leader charismatique ou qui pense l'être. Quand je dis Verts, je songe évidemment à tous ceux qui font de l'écologie un strapontin pour faire carrière. Il y a dans toutes les formations politiques, y compris les plus radicales, des militants honnêtes et désintéressés, et d'autres qui ont leur nombril pour seul compagnon, et son agrandissement pour seul horizon.<br />
Et, curieusement, plus on monte dans la hiérarchie, plus on observe le même type de comportement. En Grande-Bretagne, le nouveau chef du Parti travailliste, Jeremy Corbyn, un socialiste à l'ancienne, a pour principal adversaire l'appareil du parti, tous ceux qui ont fait carrière grâce à lui et qui craignent pour leur poste un virage à gauche de l'organisation. Chez les Verts, c'est pareil. Rompre avec le Parti socialiste, c'est perdre des postes et des possibilités de faire carrière ; alors la tentation est forte de s'asseoir sur ses idées et il en est de même pour ce qui reste du Parti communiste.<br /></p>
<p>Evidemment, l'opportunisme en politique ne se présente jamais comme tel. Emmanuelle Cosse a ainsi choisi d'entrer dans un gouvernement libéral pour y défendre des valeurs de gauche : « Ce choix repose sur une opportunité à se saisir de leviers d’action qui, face aux urgences sociales et environnementales, me paraît prévaloir sur la somme des désaccords. Alors que la France est en grande difficulté, je pense qu'elle a plus que jamais besoin d'écologie, notamment dans les institutions et au gouvernement. Face à la montée du FN, blablabla... » C'est donc au nom de l'urgence sociale et environnementale qu'Emmanuelle Cosse se rallie à un gouvernement qui n'a de cesse d'être dur avec les gueux et friendly avec le business, un gouvernement nucléocrate,qui rêve toujours de doter l'Ouest d'un aéroport éco-responsable avec parkings onéreux et super duty free. Et c'est évidemment au nom de l'antifascisme qu'elle se rallie à celles et ceux qui en ont fait le lit avec leur politiques économiques et sociales d'essence libérale. Comprend qui pourra.<br />
Elle n'embarquera pas seule sur la barque hollando-Vallso-macronienne puisqu'elle y retrouvera Barbara Pompili et surtout l'inénarrable Jean-Vincent Placé. Il faut que François Hollande soit tombé bien bas ou alors qu'il ait retrouvé son légendaire sens de l'humour pour confier un poste à ce sénateur Verts, incarnation parfaite de l'opportunisme en politique… et qui, je l'ai découvert en préparant cette émission, a débuté sa carrière chez les radicaux de gauche ! Comme quoi, les traditions...</p>Quand Macron cite Deng en pensant à Maourn:md5:bf4e45b1cf08e44524f2e34baef88a252016-02-08T22:16:00+00:00PatsyActualité politique<p>« Peu importe que le chat soit gris ou noir, ce qu'on lui demande, c’est d’attraper des souris ». Tels sont les mots tenus par notre sémillant ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, de passage à Davos, La Mecque du libéralisme décomplexée où l'on peut même croiser un bouddhiste 2.0 en train de promouvoir la paix dans le monde et la méditation à la fine fleur des affameurs encravatés.</p> <p>Les journalistes cultivés, car il en reste, remarquèrent aussitôt qu'Emmanuel Macron avaient attribué à Mao Tsé-Toung ce qui revenait à Deng Xiaoping ; et oui, Macron a attribué au Grand Timonier ce qui concernait le Petit Timonier. Car c'est bien Deng Xiaoping qui déclara en 1962 : « Peu importe qu'un chat soit blanc ou noir, s'il attrape la souris, c'est un bon chat. »Mais bon, comme l'on dit au Café du commerce, les Chinois se ressemblent tous !<br />
Rendons donc à Deng ce qui appartient à Deng.<br />
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Emmanuel Macron est un ancien banquier d'affaires et, croyez-moi, il n'y faisait pas de l'entrisme pour favoriser les desseins séditieux des ennemis du marché libre. Pour lui, l'économie n'est ni de gauche, ni de droite. Il pense comme Tony Blair, qu'il y a des choses qui marchent et d'autres qui ne marchent pas. Alors, pragmatique et se revendiquant comme tel, il met en place des dispositifs favorables au rendement du capital, parce que c'est ça qui marche et il fait la risette aux patrons parce que c'est ça qui marche. Dans notre bas monde, si on n'est pas business friendly, le business se venge et on meurt d'inanition ; en revanche, si on est business friendly, le business nous récompense en nous abreuvant au goutte-à-goutte. Choisissez votre camp !<br /></p>
<p>Cela n'est pas surprenant. Cela fait belle lurette que les socialistes de gouvernement ont troqué le couteau entre les dents pour la rose. Cela fait belle lurette que le socialisme de gouvernement nous adapte au monde du travail avec vaseline au chausse-pied. L'entreprise de destruction du code du travail tourne à plein régime, sans parler de la criminalisation des maigres réactions ouvrières.<br /></p>
<p>Bref, pour montrer au monde libre à quel point le socialisme français était moderne, business friendly, pragmatique et parfaitement bilingue, Emmanuel Macron a donc convoqué Mao Zedong. Ce qui est très rigolo. Car s'il y a bien un penseur marxiste qui, en économie, est bien plus volontariste que pragmatique, c'est bien le Grand Timonier. C'est en effet à Mao Zedong que nous devons le funeste Grand bond en avant qui, à partir du milieu des années 1950 devait permettre à la Chine de rivaliser avec l'URSS « déstalinisée » en matière d'industrialisation. C'est beau l'enthousiasme et le romantisme révolutionnaire, mais ce n'est pas ça qui met du riz dans la gamelle. En clair, pour une foultitude de raisons, dont l'incompétence et les rivalités entre bureaucrates ne furent pas les moindres, le bilan fut catastrophique aussi bien économiquement que humainement. La déjà peu productive agriculture nationale le fut encore moins, et des dizaines de millions de paysans chinois payèrent de leur vie la conception de la voie chinoise menant au socialisme sauce Mao.<br /></p>
<p>Dans un univers où il est difficile de savoir ce qui tient du désaccord idéologique ou de la rivalité personnelle, que fit Deng Xiaoping ? Il prit ses distances avec un Mao Zedong malmené par une partie des cadres communistes, sans trop s'exposer afin de ne pas se faire traiter de droitier et de finir dans un goulag local à faire son autocritique.<br />
Mao écarté de la politique économique, c'est Deng le pragmatique qui se charge de mettre sur pied une politique économique plus efficace. Mais en lançant et instrumentalisant la grande Révolution culturelle quelques années plus tard, Mao reprend la main et se venge de ceux qui l'ont écarté du pouvoir et transformé en simple étendard pour l'adulation des masses. Deng le paie de quelques années de relégation avant de réintégrer les hautes sphères du parti au milieu des années 1970 après avoir fait repentance.<br />
A la mort de Mao Zedong, les différents clans composant la bureaucratie politico-économique chinoise lavent leur linge sale en famille, et finalement le combat fratricide entre Hua Guofeng et Deng Xiaoping tourne en faveur de ce dernier, la majorité du parti préférant confier le sort du pays à un pragmatique favorable à la direction collégiale des affaires nationales. C'est donc Deng Xiaoping le pragmatique qui lance le grand mouvement de modernisation de l'appareil productif chinois, son insertion dans la division internationale du travail à la place d'atelier du monde… et c'est aussi Deng qui est aux manettes lorsqu'il faut réprimer dans le sang la révolte de la place Tian'anmen au printemps 1989.<br /></p>
<p>Afin de nous faire entrer de plain-pied dans le 21e siècle, Emmanuel Macron essaie de nous vendre des vessies néolibérales pour des lanternes socialistes modernes. Son ambition est aussi forte que louable. C'est pourquoi, pour l'encourager dans sa mission d'édification des masses, empruntons au président Mao ces mots : « La rééducation idéologique est une affaire de longue haleine, qu'il faut mener patiemment et minutieusement. »</p>Quelques réflexions sur la gauche et les classes populairesurn:md5:3a990cc2f9dea2fdb6fd5796775622242015-12-28T22:47:00+00:00PatsyActualité politique<p><strong>Nouvelle donne, vieilles rengaines n°6 (décembre 2015)</strong><br />
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Elle a promis, craché, juré. Cette fois-ci, c'est sûr, cochon qui s'en dédit, la gauche de gouvernement, celle qui mène une politique de droite tout en citant Jaurès les soirs de nostalgie, est bien décidée à reconquérir l'électorat populaire ; cet électorat qui fit sa gloire, qui l'a portée si haut et qui, depuis quelques décennies, tend à s'éloigner d'elle.</p> <p>Il fut un temps jadis où l'électorat populaire avait les traits d'un ouvrier, qualifié, travaillant dans une grande entreprise, fier de ses compétences, fier de sa culture<strong>1</strong>. Heureux temps où le Parti communiste régnait fortement sur le monde de l'entreprise, dans les quartiers ouvriers, dans les grands ensembles avec ses organisations de masse « pour la paix », « pour les jeunes », « pour les femmes », avec ses militants dévoués, désintéressés et disciplinés. Le Parti était fort, la classe avait son représentant dans l'arène électorale pour y incarner la France, la vraie France, celle qui faisait tourner les usines, celle qui avait versé son sang sous l'occupation nazie. Drapeau rouge et drapeau tricolore voisinaient sans souci. Le succès des municipalités communistes ou socialistes reposait sur la capacité des partis de gauche à constituer de véritables bastions rouges ou roses, reposant sur des réseaux aussi bien culturels que syndicaux ou associatifs, capables de leur attacher des clientèles électorales. Aujourd'hui, ce qu'on appelle le « vote de classe » s'est grandement dilué : les ouvriers ne votent plus à une très forte majorité à gauche comme par le passé ; à croire que le social-libéralisme qu'on leur propose n'est pas mobilisateur...<br /></p>
<p>Evidemment, on en venait à oublier qu'une fraction non négligeable de la classe ouvrière a toujours voté à droite et continue à le faire. L'ouvrier conservateur a toujours existé. Il pouvait être un catholique défenseur par principe de l'ordre social, un néo-ouvrier encore attaché à la terre et pas encore dégagé d'une culture de déférence à l'égard des notables, un individualiste ne se souciant que de sa promotion personnelle et de son chez-soi, un exploité satisfait de son sort ou n'en envisageant pas d'autres. Les patrons paternalistes du 19e siècle avaient bien compris qu'on pouvait acheter la paix sociale à peu de frais. « Ce n’est pas lui, l’ouvrier, qui possède sa maison, c’est bientôt sa maison qui le possède » disait le philosophe-sociologue Frédéric Le Play il y a cent cinquante ans. Le logement ne fut qu’une partie du vaste système d’encadrement qui se mit en place à partir de la moitié du 19e siècle. Le patronat créa des caisses d’épargne et de retraites, des dispensaires ou des magasins d’alimentation ; dans les houillères, le patronat fournit gratuitement le charbon dans les corons ; partout en France, il finança des sociétés philarmoniques, des clubs sportifs, des chorales, mais aussi des centres d’apprentissage pour former lui-même sa main-d’œuvre. Pour nos patrons paternalistes, un bon ouvrier était un ouvrier laborieux, rangé et surtout un père de famille ; mais cela correspondait également à l'image que nombre d'ouvriers avaient envie de renvoyer, notamment ceux qui par la promotion interne et la docilité sociale parvenaient à sortir quelque peu du rang.<br /></p>
<p>L'ouvrier est ceci, l'ouvrier est cela. Pauvre ouvrier. Les médias ne l'aiment que sous la forme de la victime. Victime de l'économie tout d'abord : une usine qui ferme, des travailleurs pas assez productifs ou qui ne pourront jamais l'être suffisamment, une délocalisation lointaine, un patronat insaisissable, des ennemis sans visage pour reprendre la stupide formule hollandienne, une grève pour le principe, un plan de sauvegarde de l'emploi qui ne sauvegarde rien, une défaite assurée, et le sentiment que le rouleau-compresseur néolibéral est bien trop fort pour que « nous, les ouvriers », on l'arrête. Il va sans dire mais mieux en le disant que dès que l'ouvrier se révolte, secoue le mobilier d'un bâtiment public ou arrache une chemise, il cesse d'être un ouvrier pour devenir un voyou, une survivance d'un autre temps quand la pacification des rapports sociaux n'était pas à l'ordre du jour. L'ouvrier véritable, domestiqué sous la forme du citoyen, doit faire là où on lui dit de faire et non mettre en pratique ce bon mot d'Emile Pouget : « C'est pas l'estomac qui fixe le taux des salaires : c'est notre biceps. »<br /></p>
<p>Victime de son inculture ensuite. L'ouvrier des médias est du genre front bas. Il est peu cultivé, souvent conservateur sur le plan des mœurs, incapable de comprendre, d'admettre que les questions sociétales sont prioritaires sur les questions sociales, que l'Europe politique est un projet magnifique qui sent la colombe… C'est pour cela que l'ouvrier est réactionnaire et vote Le Pen. C'est pour cela qu'il est contre Maastricht, que l'Euro ne le rend pas heureux, et que le social-libéralisme ne le fait pas fantasmer. C'est pour cela que la gauche de gouvernement lui préfère les classes moyennes intellectuelles du privé comme du public.<br /></p>
<p>Oui, il y a des ouvriers, des petits employés qui votent à l'extrême droite et ce, de plus en plus. Il serait stupide de le nier, les inévitables sondages ou enquêtes sociologiques, quoi qu'on en pense, sont là pour en attester. Mais cette radicalisation à droite d'une partie de l'électorat populaire ne doit pas nous faire oublier que c'est d'abord l'abstention qui caractérise leur rapport aux choses de la politique, et que jusqu'à une date très récente, le vote à gauche demeurait majoritaire<strong>2</strong>.<br /></p>
<p>Oui, il y a des ouvriers et des petits employés qui votent à l'extrême droite par racisme. Là encore, les poussées de xénophobie ne sont pas choses récentes, malheureusement, mais la situation actuelle remet en lumière la fracturation « ethnique » de la classe ouvrière. Aux uns, les boulots les moins qualifiés et les plus mal payés ou le chômage longue durée ou l'enchaînement des petits boulots, les logements sociaux de moins en moins entretenus, sans grand espoir de promotion sociale ; aux autres, les emplois plus qualifiés, les tâches d'encadrement, l'accession à la propriété et le sentiment que l'ascenseur social existe, même s'il fonctionne peu ou mal<strong>3</strong>. Et on y tient à cette petite promotion sociale qui a permis de sortir du quartier pour se payer un pavillon, protéger sa progéniture de la culture de bande et de la petite délinquance. On y tient et on la défend contre ceux avec lesquels on partageait son quotidien ; ceux qui sont restés dans les tours qui se dégradent, avec tous ces jeunes qui traînent jusqu'à plus d'heure, font du bruit et squattent les halls d'immeubles. On la défend et on la sait fragile parce que le monde est devenu plus sauvage et que le discours libéral s'est emparé de bien des têtes<strong>4</strong>. A la fin du 19e siècle, le libéral Herbert Spencer, virulent opposant à l'instauration de filets sociaux de protection, se voulait le défenseur des « pauvres dignes d’intérêt (…) qu’on accable de charges pour venir en aide aux pauvres indignes de tout intérêt. » Il y a dans toutes les classes de la société et y compris dans une fraction des classes populaires la volonté de ne plus payer pour ceux dont on juge qu'ils ne font pas le nécessaire pour s'en sortir. Le capitalisme fonctionne au désir mais son moteur c'est la frustration et l'égoïsme. Il nous sera difficile de remonter la pente.<br /></p>
<p>Comment faire pour que les classes populaires, dont peu de révolutionnaires font partie, réinvestissent le terrain de la contestation de l'ordre capitaliste du monde, et cessent de se déchirer sous les yeux intéressés des entrepreneurs en politique qui ont fait de la politique un business ? Comment faire pour que les idées radicales, ou l'idée même de radicalité, sortent des ghettos intellectuels et irriguent les espaces où vivent « ceux d'en bas » ?<br /></p>
<p>La solidarité de classe n'est pas naturelle, elle est un produit social et politique. Pour vivre, elle a besoin de luttes, de militants de terrain recréant des espaces de convivialité politique. Les classes populaires ont besoin de connaître leur histoire. Elles ont besoin d'un souffle nouveau, pas de bonimenteurs, de César, de tribun, d'hymne national et de main sur le coeur. Elles n'ont pas besoin que l'on parle en leur nom pour conter ses souffrances, ses peurs, ses angoisses. Elles ont besoin de se sentir autrement que comme les victimes d'un monde profondément injuste, autrement que comme une chose molle que ceux d'en haut malaxent, triturent, manipulent puis appellent aux urnes.<br />
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<strong>Notes</strong><br />
1. Que les sociologues et historiens me pardonnent de réduire l'électorat populaire à « la » classe ouvrière, dont beaucoup nièrent l'hétérogénéité pour les besoins de la Cause, ne gardant d'elle qu'une figure tutélaire, l'ouvrier professionnel conscient, syndiqué, politisé, de gauche.<br />
2. cf. Céline Braconnier et Jean-Yves Dormagen, <em>La démocratie de l'abstention</em>, Folio, 2007.<br />
3. Que les sociologues m'excusent de nouveau de caricaturer leurs thèses. Je vous renvoie à la lecture d'un livre collectif intitulée<em> Sociologie des classes populaires contemporaines</em> (Colin, 2015, pp. 112-115).<br />
4. Précisons : cette volonté de se « distinguer » ne serait-ce qu'un peu de ceux qui sont restés/coincés dans les barres HLM n'est en rien « ethnique ». Les « minorités visibles » qui s'en « sortent » développent les mêmes stratégies que les autres, notamment du point de vue scolaire (envoi des enfants dans le privé…), mais cela ne leur permet pas d'échapper à la xénophobie ambiante : leur présence n'est-elle pas la preuve que le quartier n'est plus ce qu'il était ? Je vous renvoie à la lecture d'une passionnante enquête sociologique : La France des « petits moyens » - Enquête sur la banlieue pavillonnaire, La Découverte, 2008.</p>Fanatisme religieux et néo-conservatismeurn:md5:b51914d88e6612d54ad04815593f1e752015-11-23T22:15:00+00:00PatsyActualité politiqueDaeshIrakReligionSyrie<p><strong>Nouvelle donne, vieille rengaine, émission n°4 (novembre 2015)</strong><br />
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De nouveau le terrorisme islamiste lié à Daech a frappé l'hexagone avec une violence rare. Ces « fous d'Allah » comme certains les appellent ont voulu punir l’État français pour son implication militaire dans un conflit syrien qui fait quotidiennement des dizaines et des dizaines de morts. Mais il y a plus que cela, plus que ce dent pour dent et œil pour œil.</p> <p>Le grand drame des djihadistes, c'est que dans leur immense majorité, les musulmans, les pratiquants comme les plus distanciés à l'égard de la religion, ne se reconnaissent pas dans leur lecture anhistorique, littérale du Coran, dans leur sectarisme qui fait d'eux les seuls vrais et respectables musulmans. Leur seul espoir de conquérir les musulmans de France est dans l'exacerbation des tensions inter-religieuses ici-même. Jouer sur le racisme et l'islamophobie, rendre insécure la situation des musulmans de France pour prouver que la place des vrais musulmans n'est pas ici, au milieu des infidèles, mais dans ce califat auto-proclamé qui émerge au coeur du Moyen-Orient. <br />
Vous l'aurez peut-être remarqué mais les djihadistes ne s'attaquent pas à l'extrême droite raciste et islamophobe parce qu'ils partagent avec elle la même idée centrale : le vivre ensemble est impossible, ou plutôt, le vivre ensemble ne doit pas être possible. Les djihadistes attaquent Paris la cosmopolite et tire indifféremment sur la population, sans se soucier le moins du monde de la couleur de sa peau ou de sa confession. Nos jihadistes, par leurs idées et leurs méthodes, sont d'extrême droite, même si parler d'islamo-fascisme n'a pas de sens, à moins de réduire le fascisme à une forme de totalitarisme et de mépris de la vie humaine, et d'oublier que le fascisme fut un paganisme.<br />
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En septembre 1990, Georges Bush, le père de l'autre, déclare devant le congrès : « Nous nous trouvons aujourd’hui à un moment exceptionnel et extraordinaire. La crise dans le golfe Persique, malgré sa gravité, offre une occasion rare pour s’orienter vers une période historique de coopération. De cette période difficile, notre cinquième objectif, un nouvel ordre mondial, peut voir le jour : une nouvelle ère, moins menacée par la terreur, plus forte dans la recherche de la justice et plus sûre dans la quête de la paix. »<br />
Vingt-cinq ans plus tard, le monde est plus convulsif que jamais. Les Etats-Unis ont voulu exporter la démocratie, ou plutôt leur conception de la démocratie, celle qui a pour pilier le marché libre et non la justice sociale. Ils ont joué, seuls ou accompagnés, aux apprentis sorciers en Afghanistan, en Irak, en Libye, en Syrie, comme si ces territoires étaient sans Histoire, sans structures sociales, sans rapports de force interne, et donc malléables à merci. Chacun sait pourtant que l'extrémisme religieux fleurit sur la désespérance sociale, la corruption, la violence étatique et les politiques discriminatoires. Ramener l'eau courante et l'électricité dans les foyers, remettre en état des services publics, rouvrir les écoles, faire que ce soit la justice et non l'arbitraire qui soit la règle… voilà en somme ce que demandent essentiellement des populations usées par des décennies d'autoritarisme politique et de guerre. Au lieu de cela, les néo-conservateurs ont joué les uns contre les autres, les chiites contre les sunnites par exemple, puni les uns et récompensé les autres. Ces pays sont devenus des poudrières sur lesquelles règnent des politiciens affairistes, des seigneurs de la guerre, des fanatiques religieux et le Big business.<br /></p>
<p>Daech a déclaré la guerre au monde libre disent certains. Non, Daech a déclaré la guerre à tout le monde, aux musulmans tout d'abord qu'ils massacrent sans pitié, et à notre insouciance, autrement dit à notre souhait de vivre paisiblement à l'écart des tourments du monde qui doivent tant à l'action de ceux que l'on a porté au pouvoir. Reste à savoir si, pour pouvoir jouir paisiblement des bienfaits de la société de consommation et de la démocratie représentative sans saveur qui est la nôtre, nous accepterons sans ciller de voir nos libertés être mises sous surveillance et nos indignations sociales être mises sous éteignoir au nom de l'Union sacrée.</p>« Compte-sur nous, Manu ! »urn:md5:50889a9a773f066cf803a3df2fb1af9c2015-05-18T21:44:00+01:00PatsyActualité politique<p><strong>Chronique (mai 2015)</strong><br />
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<p>Auditrices, auditeurs, vous avez peut-être remarqué que j'ai été étonnamment absent de l'antenne d'Alternantes ces dernières semaines.<br />
Je vois vous avouer que la dernière loi capitaliste (oups, pardon : je voulais dire antiterroriste) du gouvernement de Manuel Valls (pour qui j'ai le plus grand respect) m'a amené à prendre des dispositions extrêmes mais nécessaires.</p> <p>Je ne fais pas partie des braillards qui crient au loup avant d'en avoir vu la queue et qui tentent de nous expliquer que cette loi est dangereuse, attentatoire à nos libertés et qu'il faut la rejeter. Non, ils ont tort. Manuel Valls (pour qui j'ai le plus grand respect) a décidé de prendre le taureau par les cornes et d'en finir avec l'angélisme de la gauche bien pensante. Non, j'affirme haut et fort que jamais cette loi n'attentera à notre liberté de travailleur et de consommateur. Et c'est là l'essentiel : pour paraphraser Georges Bush Jr, les terroristes s'attaquent à la « french way of life », à la french façon de vivre et ça, c'est intolérable !<br /></p>
<p>Je le dis d'autant plus facilement que depuis près de trois décennies, j'ai beaucoup fauté. Ouais, j'ai fauté et je m'en repens. J'ai dit beaucoup de mal du capitalisme, des institutions républicaines et beaucoup de bien de certaines formes de contestation sociale. J'ai eu tort. Certes, le capitalisme n'est pas parfait, mais c'est le seul système qui produit de la richesse, donc de la croissance, donc de l'emploi, y compris le dimanche jusqu'à 22h avec ventes flash toutes les heures. Certes, nos institutions ne sont pas parfaites, mais elles assurent au moins que le peuple ignorant, indocile et versatile soit guidé par ceux qui savent et, grâce à la parité, par celles qui savent aussi. Certes, on a le droit d'être mécontent de son sort, mais est-ce une raison pour faire grève, descendre dans la rue, employer des gros mots à l'intention des policiers (pour lesquels j'ai le plus grand respect) ? Non, en démocratie moderne, on manifeste poliment et on prend son mal en patience.<br /></p>
<p>J'affirme répudier solennellement les centaines de chroniques écrites depuis les années 1980. De même, en guise de bonne foi, j'ai fait un tri intense dans ma bibliothèque, histoire d'en expurger les écrits susceptibles de porter préjudice à la Patrie. J'ai jeté « L'insurrection qui vient », les écrits de Bakounine, Lénine, Archinov, Gramsci, Pannekoek, Poulantzas. J'ai gardé le Capital de Marx parce que, comme disait Desproges « Le Capital, c'est comme l'annuaire, on tourne trois pages et on décroche », mais j'ai quand même déchiré la huitième section sur l'accumulation primitive qui explique comment le capitalisme s'est construit sur la violence, l'extorsion, la pénalisation de la misère etc. Du coup j'ai acheté quelques bibelots, plus les œuvres complètes de BHL, Caroline Fourest, Régis Debray, Philippe Val et Jacques Attali pour meubler une bibliothèque qui sonne creux et prouver que je reste à l'écoute des penseurs contemporains majeurs de l'hexagone. Mais de toute façon, lire pour comprendre le monde n'a plus grand sens depuis qu'on a les chaînes d'information en continue sur la télé…<br /></p>
<p>Je fais actuellement du lobbying auprès des administrateurs d'Alternantes FM pour que la radio change de nom et abandonne ses vieux oripeaux datant des années radios libres. Je plaide également pour l'introduction de la publicité sur l'antenne parce qu'il faut vivre avec son temps et accepter que l'argent, le commerce, la concurrence et l'ouverture des magasins le dimanche jusqu'à 22 heures avec ventes flash régulières depuis le rayon charcuterie soient des choses normales, faisant partie de notre french façon de vivre. Ce ne sont pas les Arabes (oups, pardon, je voulais dire « les Musulmans extrémistes") qui nous empêcheront d'acheter du saucisson à l'heure qu'on veut !<br /></p>
<p>Je compte également animer une émission dès la rentrée prochaine, émission qui s'intitulera « Compte-sur-nous, Manu ! », émission dont la tâche sera de défendre la pensée féconde et profonde de Manuel Valls (pour qui j'ai le plus grand respect) contre ceux qui veulent que le capitalisme (oups, pardon, une rechute : je voulais dire le terrorisme) nous terrorise et nous empêche de réformer la sécurité sociale, le code du travail et l'assurance-chômage.</p>FN : la leçon du docteur Le Guen (première partie)urn:md5:9e6462c676bc80a0965ef73fe8ef7d402015-03-30T15:35:00+01:00PatsyActualité politique<p><strong>Chronique (mars 2015)</strong><br />
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Au début du mois de mars 2015, Jean-Marie Le Guen a produit une note intitulée <em>Front national : le combat prioritaire de la gauche</em> ; note accessible à toutes et tous sur le site de la Fondation Jean-Jaurès. La montée en force électorale du FN et son relooking depuis que « fifille » a pris les rênes de l'entreprise familiale imposait que l'on pose un nouveau diagnostic sur ce phénomène inquiétant : un parti d'extrême droite est en passe de devenir la principale force politique du pays.</p> <p>Un pays malade a besoin d'un médecin capable d'aller fouiller dans ses entrailles et d'y découvrir les racines du mal. Ca tombe bien, Jean-Marie Le Guen l'est. Les mauvais langues susurrent même qu'il est plus à l'aise dans la rédaction d'une prescription que dans le remplissage d'une feuille d'impôts. Certes, il a sous-évalué de quelques centaines de milliers d'euros la valeur de son patrimoine immobilier, mais répétons-le : il est médecin, pas comptable !<br /></p>
<p>En dix-huit pages, cet ancien strauss-khanien nous dit tout sur les raisons qui poussent nombre de citoyens français à donner leur voix, à confier leurs espoirs à une organisation réactionnaire. Je n'en citerai qu'un seul dans le cadre de cette chronique : la défiance à l'égard des politiques.<br /></p>
<p>Et voici notre Jean-marie Le Guen citant Jérôme Cahuzac qui gérait ses comptes off-shore tout en se faisant le champion de la lutte anti-évasion fiscale ; citant Thomas Thévenoud, le technocrate frappé par des crises de phobie administrative ; citant Aquilino Morelle, l'ancien conseiller du président Hollande, obligé de démissionner après la révélation de ses liens avec l'industrie pharmaceutique alors qu'il était payé par l’État pour les surveiller ; citant Kader Arif, ex-secrétaire d’État aux anciens combattants, démissionné en novembre 2014 ; citant… Excusez-moi, je m'égare : le médecin Le Guen, par décence, s'est bien gardé d'accabler ses anciens comparses et de railler la « République exemplaire », tête de gondole hollandienne idéale pour convaincre le gogo écoeuré par les frasques sarkoziennes. Non, il s'en tire par une phrase : « <a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2015/03/30/le FN" title="le FN">le FN</a> prospère évidemment sur l'exploitation de certains comportements contraires à l'exemplarité ou à la probité. » Nous voici donc rassurés : notre quinquagénaire République, cinquième de son Etat, n'est pas la République des copains et des coquins raillée en son temps par Michel Poniatowski ; le ver n'est pas dans le fruit, même du côté du Conseil général du Tarn. Et quand on a un ministre de l'Economie socialiste qui déclare : « Il faut des jeunes Français qui aient envie de devenir milliardaires », on ne peut décemment en vouloir à une classe politique que l'engagement sans faille au chevet de la nation souffrante à transformer en notables, petits et grands bourgeois.<br /></p>
<p>Ce n'est pas un hasard si je me suis focalisé sur cet aspect des choses, très largement dédaigné par Jean-Marie Le Guen. Car ce qui distinguât longtemps la gauche de la droite pour les classes populaires était la croyance dans le profond désintéressement de ceux qui luttaient pour la « Justice sociale ».<br />
Que cette croyance ait été sans grand fondement n'a ici peu d'importance ; que le socialisme démocratique ait servi de marche-pied pour nombre d'opportunistes, professeurs ou avocats, depuis la fin du 19e siècle n'en a pas plus. Cette croyance n'est plus, et sa disparition explique pour une bonne part l'importance de l'abstention dans les quartiers populaires et dans la jeunesse. Car il est là le premier parti de France, un parti qui mêle indifférence à l'égard de la chose politique, dégoût des mœurs politiciennes, désespérance sociale et absence de perspectives.<br /></p>
<p>En 1898, le syndicaliste anarchiste Fernand Pelloutier écrivait : « Ce qui manque à l'ouvrier, c'est la science de son malheur ». Il ne la trouvera pas dans la glose libérale d'un Emmanuel Macron qui ne lui apportera pas la science mais le bréviaire de la soumission à l'ordre capitaliste du monde.<br /></p>Une Valls au pas de l'oieurn:md5:b3f9ab1397de42098526372961ac17e72015-03-16T16:50:00+00:00PatsyActualité politique<p><strong>Chronique (mars 2015)</strong><br />
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Il fut un temps où nous appréciions la valse. La valse à trois temps, celle qui s'offrait encore le temps de s'offrir des détours du côté de l'amour, comme l'a chanté jadis le Grand Jacques. C'était le temps de l'insouciance, le temps où le Grand Capital nous faisait certes danser, nous imposait ses cadences ; mais c'était aussi le temps où le prolétariat, combatif, parvenait à arracher pour solde de toute sueur une place au paradis de la consommation de masse. Les années 1960 sont loin.</p> <p>Les temps ont bien changé, on ne danse plus guère la valse. Aujourd'hui, elle siège à Matignon, en attendant mieux.<br />
La Valls d'aujourd'hui n'a pas de temps à perdre. Elle nous prend à la gorge et nous entraîne, tambour néolibéral battant, sur le chemin de la rédemption. Car nous avons péché, sans canne ni circonflexe, accroché à nos filets sociaux de protection, indispensables béquilles, fruits de nos luttes, des compromis d'après-guerre. Rendre supportable l'insupportable. Le vol de nos vies, de nos espoirs, de notre temps qui n'est que celui de l'argent pour ceux qui comptent, évaluent et spéculent.<br /></p>
<p>La Valls d'aujourd'hui veut nous faire danser à son tempo. Droit dans ses bottes, notre chef d'orchestre préfère le gourdin à la baguette, parce que son tempo est martial, sans artifices. Il goûte peu la dissonance. La Valls d'aujourd'hui ne connaît qu'un temps : celui de l'Ordre, républicain of course, celui qui servit jadis à tuer les Communards en 1871 ou à jeter dans la Seine des dizaines de travailleurs algériens un soir d'octobre 1961. Pardonnez-moi, je m'égare.<br /></p>
<p>A Sivens, aux pas cadencés, ses employés harnachés comme des robocops ont fait la chasse aux chevelus, épaulés par la fine fleur du syndicalisme agricole régional qui conjugue avec bonheur défense de l'agro-business, fascisme rural et tribalisme ethno-corporatif (on a les supplétifs qu'on mérite) ; épaulés également par ce que la République bourgeoise produit, génération après génération, de plus minable et de plus bouffi d'orgueil : le notable. Notables des villes, notables des champs qui tels les radis ne sont jamais très loin de l'assiette au beurre. Pardonnez-moi, je m'égare, l'élu local ne mérite pas autant de mépris…<br /></p>
<p>A Sivens donc, l'Ordre a gagné la bataille. La jeunesse qui refuse la croissance, l'emploi, le développement et, n'en doutons pas, le socialisme moderne à la Macron, a été priée manu militari de manifester ailleurs son dégoût du vieux monde. L'Ordre a gagné la bataille : il y aura quelque chose à cet endroit-là. Quoi ? On en sait rien mais il faut qu'il y ait quelque chose, un barrage plus petit ou ne serait-ce qu'un foutu bassin à poissons rouges, pour montrer qu'un Gouvernement, de toute la hauteur de sa majuscule, ne peut être vaincu par une association de malfaisants et d'éco-terroristes.<br />
Quelques plaies, quelques bosses et une vingtaine d'arrestations plus tard, l'ineffable Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur, s'est félicité d'une « évacuation sans heurts », avant d'ajouter, of course, une de ces indémodables lapalissades que les gens de l'oligarchie répètent à l'envi : « Dans la République, le seul chemin est celui du refus de la violence. »<br /></p>
<p>De quelle République parle-t-il ? Nous ne le savons pas. De la République du travail et du pain des ouvriers révoltés de 1848 ? De la république de la Justice et du pain des Communards de 1871 ? De la République du travail le dimanche et du pain de la veille, cette promesse de félicité Vallso-macronienne ? Allez savoir…<br /></p>
<p>« Dans la République, le seul chemin est celui du refus de la violence ». Fort bien, Monsieur Cazeneuve, mais alors, complétez s'il vous plaît votre lapalissade par ces mots plus anciens, ces mots de Casimir Périer lancés en l'an de grâce 1831 à l'intention des canuts révoltés : « Il faut que les ouvriers sachent qu'il n'y a de remède pour eux que la patience et la résignation. » <br /></p>« Des Charlie ou des charlots ? »urn:md5:43984a8025a13a6894939f6f5b8549022015-01-14T19:57:00+00:00PatsyActualité politique<p><strong>Mon camarade Gedicus a eu le bon goût de m'envoyer cette chronique aussi salvatrice que sarcastique. Je la poste ici avec of course son autorisation. Seul le titre est de moi...</strong><em></em><br />
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Hosanna !<br />
Un miracle s’est produit dimanche 11 janvier : en France et dans de nombreux pays du monde, des foules se sont rassemblées pour manifester leur refus de la « barbarie », défendre la « démocratie », la liberté d’expression, et les « valeurs » de la république, dans le cadre d’un « hommage » aux personnes tuées par trois connards fanatiques. Cette union sacrée devrait, n’en doutons pas, porter ses fruits.<br /></p> <p>Donc, dès aujourd’hui, les chefs d’États qui étaient présents à ce rassemblement vont, partout, libérer les journalistes emprisonnés chez eux et accorder à tous les journaux et médias une totale liberté d’expression et de caricature. En France même, les grands médias vont cesser d’uniquement prêter leurs voix à la propagande des oligarques et de leurs chiens de garde ; les rédacteurs en chef vont cesser de virer les journalistes qui ne font pas où leurs propriétaires marchands d’armes et de mensonges leur disent de faire; ces journalistes vont cesser de s’autocensurer ; tous ceux qui ont été mis à la porte des radios et télés pour irrévérence vont être réintégrés ; et toutes les bibliothèques de France vont acheter Siné Hebdo, CQFD, Le Fakir, Article 11, et autres journaux réellement indépendants, comme il leur est demandé de le faire pour Charlie hebdo. Les lois permettant à la police de fermer des sites internet seront abrogées, en même temps que de nombreuses autres lois liberticides.<br />
Les policiers, devenus des héros, cesseront de blesser et tuer des manifestants ou des jeunes « des banlieues », et offriront des fleurs aux grévistes et autres « contestataires ».<br />
De nombreux gouvernement engagés dans des persécutions de certaines populations, dans des arrestations, tortures, déportations, agressions guerrières, dont les représentants étaient présents à cette manifestation, vont cesser tout cela. Dans tous ces pays, et particulièrement en France et en Europe, les internements et expulsions d’ « étrangers » fuyant la misère, les persécutions ou la guerre, vont prendre fin. La xénophobie et le racisme n’auront plus cours et les politiciens et hommes d’États qui ont fait leur fond de commerce de la stigmatisation de boucs émissaires en tous genres vont se taire.<br />
Tout ce qui nourrit les fanatismes, à commencer par les monstrueuses « inégalités » sociales, l’exploitation éhontée de peuples entiers, le pillage de leurs ressources, la pollution de leur environnement, les magouilles stratégiques d’États et de gangs au service de multinationales, le matraquage propagandiste abrutissant, tout cela va cesser. Et, la misère étant bien plus meurtrière que les balles et les bombes, tout sera mis en œuvre pour la supprimer.<br />
Car, si tout cela ne se fait pas, on sera en droit de se demander à quoi aura bien pu servir ce grand rassemblement œcuménique1, transformé par tous les médias et tous les ministères en tapageur show d’amour et de tolérance de tous pour tous, sinon à instrumentaliser une légitime indignation ; à récupérer l’émotion populaire pour faire marcher les citoyens au pas derrière les faux-culs régnants (Comme en 14 !)2 ; à utiliser la peur des « barbares » pour mettre toujours plus la société en état de siège permanent ; à créer toujours plus de lois permettant de réprimer toutes les rébellions en les assimilant à du terrorisme.<br /></p>
<p>En ce cas, beaucoup de ceux qui se sont sentis Charlie, auront été pris pour des Charlots, et trouveront peut être d’autres raisons de s’assembler moins naïvement dans les sombres temps à venir.<br /></p>
<p><a href="http://gedicus.ouvaton.org">Gédicus</a></p>
<p><strong>Notes</strong>
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<strong>1.</strong> Sur ce mot, Wolinski me susurre une plaisanterie salace que je ne répète pas.</p>
<p><strong>2.</strong> On comprendrait mal que dans ce contexte de grande messe pour le droit à la caricature, certains s’offusquent de cette remarque qui pourrait leur sembler caricaturale, et qui ne l’est pas tant que ça.</p>Quelques réflexions après la manif du 22…urn:md5:a52488a4b0abb2f5cdf9f029f35095fb2014-11-23T11:13:00+00:00PatsyActualité politique<p><strong>Chronique (novembre 2014)</strong><br />
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Combien étions-nous en ce samedi 22 novembre à défiler dans les rues de Nantes contre la répression policière ? 1500 ou plus ? En tout cas beaucoup plus qu'attendu, aussi bien du côté des organisateurs que du côté de l'Ordre. Pourtant, tout avait été fait pour dissuader le citoyen honnête à venir garnir les rangs de cette manifestation. Du côté de l'Ordre, nombreux étaient ceux qui prédisaient que Nantes, de nouveau, serait réduite en cendres, serait transformée en « zone d'affrontement direct », serait, serait, serait… d'où l'impressionnant déploiement de forces physiques et matérielles à laquelle nous fûmes confrontés.</p> <p>Il y a un point commun entre partisans de l'Ordre et certains opposants : l'inflation verbale. On aime se griser avec les mots : dans un cas pour faire peur aux indécis et au citoyen lambda ; dans un autre parce qu'on aime jouer avec les références guerrières et viriles pour démarquer son territoire de celui des militants plus institutionnels pour qui la non-violence, le débat citoyen sont l'alpha et l'oméga de la politique.<br />
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<img src="http://patsy.blog.free.fr/public/.Manif_nantes_novembre_m.jpg" alt="Manif_nantes_novembre.jpg" style="display:block; margin:0 auto;" title="Manif_nantes_novembre.jpg, nov. 2014" /><br /></p>
<p>Je ne me retrouve pas plus dans le discours de ceux que l'émeute fait « triper » que dans celui des « colombes ». Non, pas plus à Notre-Dame qu'à Sivens, nous ne sommes en zone de guerre. Et tant mieux. Cela ne veut nullement dire que le déploiement policier sur ces zones, que l'équipement utilisé ne soient pas significatifs ; cela veut dire que l’État démocratique bourgeois n'est pas encore entré dans une phase critique qui nécessite un recours systématique à des formes radicales de répression de masse. L’État français n'est pas l’État turc (kémaliste ou islamiste) ou l’État mexicain (priiste ou non). Il gère et fixe des limites à ses troupes, en croisant les doigts pour qu'elles respectent son cahier des charges. C'est pour cela que l'on parle encore de bavures : la bavure n'est pas son pain quotidien mais le symbole de son échec à maintenir l'Ordre<strong>1</strong>. Ce sont les Etats faibles qui tuent, parce que leur pouvoir repose sur leur capacité à faire peur.<br /></p>
<p>Un tract intitulé « Contre la violence d’État, solidarité et résistance ! » a été diffusé samedi<strong>2</strong>. Les auteurs expliquent que la brutalité croissante des forces de l'ordre est liée à la « volonté réfléchie de l’État de soumettre l'ensemble de la société aux intérêts du patronat ». C'est vrai mais à mes yeux insuffisant. Je pense que la brutalité croissante des forces de l'Ordre est liée avant tout au fait que les résistances au monde tel qu'il va sont de plus en plus fortes et "désarçonnantes" pour les gestionnaires de l'Ordre. Le pouvoir sait gérer une lutte ouvrière, même radicale. Il sait qu'il y aura des périodes de tension, peut-être des heurts et des dégradations mais qu'à la fin, il sera trouvé un compromis sur le nombre de licenciés, de reclassés, sur l'envergure du plan de sauvegarde de l'emploi. Mais dans le cas de Notre-Dame des landes ou de Sivens, pas de compromis possible : c'est aéroport ou pas, barrage ou pas. Et comment sécuriser des zones rurales qui s'étendent sur des hectares ? Comment affronter des formes d'action bien loin des traditionnels défilés urbains ? Comment faire face à des militants déterminés qui osent assumer un rapport de force musclé et qui, surtout, sont organisés pour cela ? Là, sur ces terrains-là, face à cette adversité-là, parce qu'il ne peut y avoir qu'un gagnant et qu'un perdant, l’État balbutie son bréviaire répressif.<br /></p>
<p>Violence, non violence ? Ce débat n'a pas de sens. L'Inde n'est pas devenue indépendante grâce à la non-violence gandhienne mais parce que pratiques de désobéissance civile et émeutes sociales ont fini par contraindre la puissance coloniale britannique à se retirer. La condition noire aux Etats-Unis ne s'est pas améliorée (pour les classes moyennes essentiellement) parce que Martin Luther King était un prêcheur charismatique de talent, mais parce que son discours et celui porté par les Black Panthers ont fini par fragmenter le « camp des blancs », obligeant celui-ci à promouvoir un nouveau compromis ethnico-social. Les projets d'aéroport et de barrage sont actuellement en « stand-by » parce que résistances institutionnelles et radicales ont trouvé jusqu'à aujourd'hui encore un modus vivendi.<br /></p>
<p>Combien étions-nous ce samedi-là dans les rues de Nantes ? Je ne sais. A un moment, j'ai pris un chemin de traverse pour retrouver la tête de cortège au niveau de la Préfecture, là où des échauffourées eurent lieu, parce que pour la première fois les manifestants pouvaient être en contact avec les robocops<strong>3</strong>. J'ai trouvé cette balade significative. Là, rue du Calvaire, cours des 50-Otages, les citoyens sans aucun doute honnêtes vaquaient à leurs occupations, les bras chargés de paquets, alors qu'à quelques centaines de mètres, le canon à eau entrait en action. C'est à cela je crois que l'on peut mesurer la qualité d'un dispositif politico-militaire en régime démocratique bourgeois : quand il contient la contestation sociale en périphérie du royaume de la marchandise.<br />
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<strong>Notes</strong><br />
1. Je n'ai jamais été convaincu par le discours de ceux qui considèrent que les bavures commises lors d'affrontements politiques et sociaux, et celles qui sont la conséquence d'interpellations « qui tournent mal » sont de même nature. A la différence des premières, la xénophobie et le racisme de classe sont bien souvent au coeur des secondes. Et, que je sache, lorsque ces bavures provoquent des mouvements de protestation violents, ceux-ci ne provoquent pas d'autres morts. Faire le distinguo entre ces deux formes de « crimes d'Etat » ne signifie pas qu'il ne faille les lier dans une même opprobre et un même combat.<br />
2. Tract disponible à cette <a href="http://rebellyon.info/CONTRE-LA-VIOLENCE-D-ETAT-SOLIDARITE-ET.html">adresse</a>.<br />
3. Lors du défilé, les robocops bloquaient les accès aux rues menant au centre-ville, mais ils étaient systématiquement en retrait d'une cinquantaine ou centaine de mètres. Hormis du côté de la Préfecture, il n'y eut qu'un seul endroit où ils furent à un jet de pierre des manifestations : sur la place devant l'ancien palais de justice. Et là, quelques projectiles ont fusé...</p>Un homme est mort (II)urn:md5:06eead5779661d40d51e8848c0b4bd4f2014-11-03T14:43:00+00:00PatsyActualité politique<p><strong>Chronique (novembre 2014)</strong><br />
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Un homme est mort. Celui-ci ne portait pas de moustache ni ne dirigeait une multinationale de l'hydrocarbure. C'était un anonyme, un simple, un gueux, pas le genre à serrer la louche d'un oligarque, d'un satrape des steppes russes. Pas le genre à poser son derrière dans un Falcon et à s'essuyer les pieds sur les tarmacs d'ici et d'ailleurs.</p> <p><br />
<img src="http://patsy.blog.free.fr/public/.Sivens_m.jpg" alt="Sivens.jpg" style="display:block; margin:0 auto;" title="Sivens.jpg, nov. 2014" /><br />
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Rémi Fraisse est mort dans des conditions non encore totalement élucidées, à l'heure où j'écris ces lignes. Nous sommes au tout début novembre et l'on sait juste que ce jeune militant se trouvait dans la nuit du 26 octobre sur les lieux des affrontements sévères opposant les forces dites de l'ordre aux militants physiquement les plus déterminés à empêcher l'avancement des travaux du si contesté barrage de Sivens.
« Il fallait bien que cela arrive un jour ». Telle fut sans doute la première réaction de beaucoup d'entre vous en entendant cette nouvelle à la radio au petit matin.<br />
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Il fallait bien que ça arrive un jour, dira celui que la radicalité et l'organisation des manifestants impressionnent et effraient.<br />
Il fallait bien que ça arrive un jour dira celui que la violence des dites forces de l'ordre et les moyens techniques mis à leur disposition impressionnent et effraient. Toutes celles et ceux qui ont mis les pieds sur la ZAD jours d'affrontements ou participé par exemple à la manifestation du 22 février 2014 ont pu voir, sentir et entendre : voir des robocops en action, sentir les gaz, entendre les déflagrations. Ils ont pu voir également les visages tuméfiés de quelques jeunes frappés par des armes non létales, comme il convient de dire aujourd'hui.<br /></p>
<p>La violence fait peur, légitimement peur. Nous sommes beaucoup à fonctionner sur un mode binaire : le gentil manifestant et le méchant CRS, la victime et le coupable, la morale contre l'ignominie ; l'essentiel étant de bannir l'usage de la violence de la pratique revendicative. Comme si le choix des armes dépendait exclusivement de nous, et non du rapport des forces. Soyons-en sûrs, sur les ZAD d'ici et d'ailleurs, les violents et les non-violents comme l'on dit sont indispensables les uns des autres. Sans rapport de force assumé physiquement par les premiers, sans la surface politique et médiatique apportée par les seconds, pas de victoire possible.<br /></p>
<p>Quand Malik Oussekine est mort sous les coups des voltigeurs en 1986, certains ont déclaré qu'il n'était pas raisonnable de participer à des manifestations houleuses quand on était sous dialyse. On pourrait dire la même chose de Rémi Fraisse. Que faisait-il là, au milieu des violences, lui que l'on présente comme pacifiste, amoureux de la nature et des oiseaux ou de je ne sais quoi ? Y allait-il pour se battre ou pour assister en badaud aux affrontements ?<br />
Je ne le sais pas moi-même. Ce que je sais, c'est que je n'ai pas besoin de le savoir « agneau » victimes des loups assermentés pour me sentir solidaire. Solidaire de son combat contre les grands projets inutiles, la marchandisation du monde, l'agro-business et le culte du béton. Solidaire contre la militarisation de nos démocraties avancées et le vigipirate perpétuel que l'on nous impose.<br /></p>
<p>Rémi Fraisse est mort, voilà tout. Et il fallait bien que ça arrive un jour.<br />
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<img src="http://patsy.blog.free.fr/public/.Ni_oubli__ni_pardon_m.jpg" alt=" " style="display:block; margin:0 auto;" title=" , nov. 2014" /></p>Sept thèses pour un mouvement libertaire au centre de la tourmenteurn:md5:e7a70183a94d2d2343a5cf61d3c5d25e2014-10-17T23:25:00+01:00PatsyActualité politiqueAnarchisme<p><strong>Une proposition d’action et de recherche pour le mouvement libertaire dans ce début turbulent du XXIè siècle doit nécessairement incorporer un bref diagnostic de la situation. Un diagnostic qui se résume en un seul mot : la crise.</strong><em></em> par José Luis Carretero <a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/1" title="1">1</a>, Madrid 13.01.13.</p> <p>Crise d’un système de domination et d’un mode de production fondée sur l’exploitation et la violence. Crise, aussi, des paradigmes classiques traditionnels qu’on lui opposait, qui le poussaient à se limiter et le faisaient basculer dans la répression et la réforme.<br />
N’oublions pas ce second aspect de la crise. Les mouvements sociaux (et davantage, ceux au niveau global) ont montré ces dernières décennies les traces d’une grande défaite, celle de la première vague révolutionnaire, qui a duré de 1871 à 1989 <a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/2" title="2">2</a>. Les cicatrices laissées par cette bataille sont encore visibles jusqu’à aujourd’hui. Et, qui plus est, les sous-produits toxiques générées par la tentative de métaboliser la résistance de la part du système, se voyant victorieux, font presque partie de l’ADN de ce qui a survécu et qui, à l’heure actuelle, fait face à l’émergence plus que probable d’un nouveau cycle de luttes, franchement encourageant.<br />
Le mouvement libertaire ne fait pas exception. Ces années de défaite et de marginalité l’ont chargé de multiples poids et ont attribué à son image des traits sombres que nous devons écarter si nous voulons qu’il devienne un outil solide et utile dans les mains de ceux qui veulent renverser l’état actuel des choses.<br />
Par conséquent, et vu certains débats actuels, je vais essayer de dénouer certains nœuds que les dynamiques présentes cherchent à imposer à nos pratiques et nos propositions. Voici quelques thèses pour leur discussion publique et fraternelle, dans la recherche d’une recomposition de l’insurrection libertaire qui commence à se faire connaître un peu partout :<br /><br /></p>
<p><strong>Première thèse : Notre mouvement est social.</strong><br />
Le mouvement libertaire est un mouvement qui cherche à transformer la réalité. C’est aussi simple que cela. Changer le monde c’est modifier les usages et les structures d’ensemble qui soutiennent la forme de vie dominante, c’est-à-dire le capitalisme.<br />
Cela signifie que notre quête n’est pas une recherche spirituelle de plus (une sorte de nouveau christianisme à l’affût de jeûnes et de pénitences), mais bien une tentative révolutionnaire. Et, aussi étrange que cela puisse paraître, notre modèle n’est pas le saint ou la communauté moralement pure, mais celui du militant lié aux mouvements de masses et aux grandes luttes sociales. Luttes, en tout cas, révolutionnaires, c’est à dire qui cherchent à produire des effets brusques d’avancées, et pas seulement une évolution lente.<br />
En outre, cela implique également que le lien avec les grandes masses de la population, de leurs besoins et de leurs intérêts, est absolument indispensable. Nous n’allons rien transformer tout seul, et l’avant-gardisme le plus profond consiste à imposer aux foules ce qui devrait les intéresser <a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/3" title="3">3</a>. Cela veut dire que la défense des intérêts matériels immédiats de ceux qui sont soumis et exploités ne peut pas être abandonnée et qu’elle est absolument essentielle, au moment du Grand Pillage et de la forte offensive de l’oligarchie financière, faire face à un pouvoir libéré de tout contrôle dont les dynamiques visent la suppression des acquits et génèrent la misère.<br />
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<strong>Deuxième thèse : De plus, notre mouvement appartient à la classe ouvrière.</strong><br />
Toujours, tout au long de sa vie, le mouvement libertaire s’est expressément identifié en accord avec les intérêts de la majorité sociale exploitée : avec le prolétariat des campagnes et des villes. Nous pouvons discuter sur comment aujourd’hui, cette classe se constitue, quelles sont ses lignes de fractures authentiques. Ce que nous ne pouvons pas, car c’est radicalement faux et que les dernières décennies nous montrent que cela ne nous mène nulle part, c’est nier la réalité de l’exploitation du travail et de l’extraction de la plus-value.<br />
La classe ouvrière existe, même si elle est précarisée et, peut-être, plus soumise que jamais auparavant. L’illusion de l’existence d’une classe moyenne omniprésente est en train de s’effondrer aujourd’hui. C’est la thèse illusoire, très liée à l’extension de la consommation, que le travail dans le capitalisme est quelque chose de sporadique et non nécessaire à la survie. La force des choses nous a renvoyés à la pure réalité : la « libération du travail » passe par sa réappropriation et sa socialisation, non pas par une fuite vers la marginalité qui ne fait que renforcer les chaînes-mêmes auxquelles on désire nous soumettre.<br />
Bien sûr, cela nous amène à aventurer une autre déclaration : nous pouvons critiquer les aspects les plus régressifs du monde du travail organisé, rire de leur faiblesse actuelle et des tentatives de lancer une grève générale de syndicalisme militant ; nous pouvons faire toute la phraséologie qui nous plaira sur les « nouveaux acteurs sociaux » que, du reste, nous sommes incapables d’organiser... sans le monde du travail, il n’y a pas de Révolution Sociale possible. Sans les travailleurs <a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/4" title="4">4</a> organisés le processus constitutionnel futur <a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/5" title="5">5</a> ne sera que l’expression de l’ambition politique des restes radicalisés de la classe moyenne. Sans classe ouvrière il n’y a pas de contenu social, il n’y a qu’un changement politique (dans le meilleur des cas, car il est également difficile de changer quoi que ce soit sans pression sur l’activité productive) agrémenté, c’est possible, de quelques assemblées comme cosmétiques.
Le futur processus constitutionnel n’a de sens que dans une perspective libertaire, s’il intègre clairement la composante sociale, et pour ce faire il faut la pression de la classe ouvrière organisée. Certains éléments de démocratie directe purement marginaux dans une future constitution ne suffisent pas, si finalement nous en restons, comme maintenant, à la réforme du travail, aux entreprises de travail intérimaire, la sous-traitance.<br />
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<strong>Troisième thèse : Le mouvement libertaire vise à l’unité.</strong><br />
Notre mouvement, comme dynamique réelle de classe et, l’engagement pour l’unité du sujet et de secteurs exploités.<br />
Connaissant la réalité et l’expérience des luttes passées, nous savons que seule l’unité de l’ensemble des secteurs de la population soumise à la discipline oligarchique de l’élite financière transnationale, peut constituer un bloc suffisamment étendu et fort pour pousser les changements dans la direction d’une démocratisation (politique et économique) du monde.<br />
Cette Grande Alliance Sociale pour changer serait l’expression, voire 99%, sûrement de la grande majorité de la population globale. Notre objectif est d’incorporer à cette lutte les ́léments suffisants d’approfondissement assembléaire et socialisant pour en faire le début d’un grand processus de transition vers un autre modèle global radicalement différent. Faire avancer les transformations qui mettent en marche ce grand bloc historique vers l’autogestion de la production et la démocratie directe, en surmontant les hésitations et les doutes d’autres secteurs et de fractions de classe qui prétendraient s’arrêter à mi-chemin, ce qui ne peut que conduire à une involution.
Mais pour construire cette Grande Alliance Sociale, il est évident que nous devons renoncer à tout dogmatisme et à tout sectarisme, à la passion de discréditer et à juger sommairement les autres. Des habitudes profondément ancrées dans nos milieux.<br />
En partant de ce que la critique fraternelle et constructive est non seulement nécessaire, mais profondément salutaire, nous devons inclure aussi dans l’ADN de notre mouvement l’habitude de la coopération et de l’alliance, de la complicité et de l’entente avec tous ceux qui luttent. Pour écouter, une fois pour toutes, et pas seulement décocher des critiques sans fin, les gens dans les rues et les lieux de travail dont nous parlons tant.<br />
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<strong>Quatrième thèse : Organisation ? Oui, et encore oui.</strong><br />
L’ennemi est organisé. D’autres secteurs, qui veulent orienter les eaux des luttes sociales vers leur moulin autoritaire, sont organisés. Renoncer à l’organisation serait suicidaire et irresponsable, à moins que nous ne voulions qu’être éternellement des bricoleurs de concepts que les autres manipulent à leur guise pour en faire les outils de leur pouvoir.<br />
En outre, l’organisation en soi n’est ni mauvaise ni aliénante. Nous avons les éléments (les assemblées, le fédéralisme ...) pour construire des structures avec un sens et une légitimité démocratique. Et nous pouvons le faire dans toutes les sphères sociales (professionnelle, citoyenne, idéologique ...). Chaque organisation n’est pas nécessairement avant-gardiste (dans le mauvais sens du terme). En revanche c’est le cas de ce qu’une partie du féminisme appelle la "tyrannie de l’absence de structures", où toutes les décisions sont prises dans les couloirs et les bars, par une minorité de gens qui se connaissent et qui n’ont de compte à rendre à personne. Et dans l’assemblée tout est fait, non pas par tel ou tel parti (cela se verrait d’une façon ou d’une autre), mais par un "réseau fluide" de personnes qui sont toujours les mêmes et empêchent que quelqu’un d’autre participe, mais certes, avec toute une phraséologie sur le communautaire. Nous avons, certains d’entre nous, suffisamment d’expérience des milieux diffus et informels pour savoir de quoi nous parlons. Il y a des "organisations" démocratiques et des "réseaux" profondément centralistes, et vice versa. Mais l’organisation (démocratique, que nous avons en tête) permet de faire des choses de plus en plus complexes et à plus grande échelle et, de plus, c’est le seul garde-fou dans les moments de reflux, les attaques de la répression, les infiltrations et les dérives chaotiques.<br />
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<strong>Cinquième thèse : L’hybridation ? Bien sûr, mais comment ?</strong><br />
Ici, je prends un peu position sur les affirmations, dans un article récent, du camarade de la CGT Antonio J. Carretero.
Nous devons intervenir, je l’ai clairement exprimé ailleurs. Et le faire bien au-delà du monde du travail, je n’en ai aucun doute. Nous devons être dans les mouvements sociaux, l’écologie, les CSA <a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/6" title="6">6</a>, dans les grands courants culturels, musicaux, poétiques ... partout. Nous faisons partie d’un monde en ébullition, et nous n’avons qu’une vie. Le vitalisme et la passion doivent nous pousser à faire tout notre possible pour développer toutes nos compétences et nous insérer dans toutes les luttes. C’est, en outre, une nécessité du point de vue stratégique et tactique.
Ce que je ne vois pas bien c’est que cela doivent passer nécessairement par le syndicat, indépendamment des forces ou de la quantité d’énergie qu’il peut canaliser dans cette direction. S’il y a trop de possibilités, pourquoi pas ?, mais cela peut également bloquer les autres travaux nécessaires. Je pense que ce qui est latent dans cette proposition de "syndicat intégral" c’est l’absence radicale d’une d’organisation spécifique unitaire et large, qui puisse adopter une perspective holistique <a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/= totale" title="= totale">= totale</a> à partir d’une position résolument libertaire. Des tendances spécifiques existent, mais leurs tendances de « synthèse » et de lien exclusif avec une organisation syndicale ou une autre ont rendu impossible cette fonction. Alors on se sert des "plates-formes" sur plusieurs sujets communs et parfois (pas toujours, car il y a beaucoup de plateformes très assembléaires et saines <a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/7" title="7">7</a>) nous dépassons le complexe et la crainte de travailler pour les autres. Nous voulons résoudre cela par un "syndicat intégral" qui jouerait le rôle de l’unité spécifique qui n’existe pas, mais bien sûr, un syndicat a d’autres besoins et d’autres urgences. Le moment est venu d’envisager la construction d’une organisation libertaire spécifique, qui, à partir d’approches unitaires et non dogmatiques favoriserait l’extension de l’influence sociale de nos perspectives dans l’ensemble des mouvements populaires. Dans le cas contraire, c’est la poursuite de la prévalence de la fracture et des tendances de plus en plus délétères dans nos milieux.<br />
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<strong>Sixième thèse : Construire et défendre.</strong><br />
Il faut être dans les mouvements sociaux qui luttent contre la grande offensive des puissances financières. Il faut défendre le salaire social sous la forme de l’enseignement public et gratuit ou de l’accès universel aux soins de santé. Il faut faire face aux réformes du travail et des retraites. Il faut éviter que des êtres en chair et en os soient dans la pauvreté et dans la misère.<br />
Il faut aussi construire des alternatives de vie viables contre la façon dont le monde est structuré. Étendre un réseau autogestionnaire vaste et diversifié et expérimenter des formes de socialisation et de contrôle des travailleurs et des services aux citoyens.<br />
Il faut faire les deux choses en même temps, aussi difficile que cela puisse être. Cela n’est ni antithétique ni contradictoire. Défendre le front est essentiel pour que l’arrière-garde puisse faire des expérimentations. Faire de l’arrière-garde un laboratoire de nouvelles formes de vie sans autorité et sans exploitation est indispensable pour que l’affrontement avec les dangers du front ait un sens. C’est une autre façon de faire pression pour la classe ouvrière : l’organisation ouvrière en revendication constante et des expériences de construction de la nouvelle société, en insistant sur la structure productive. La confluence de ces deux domaines édifie la possibilité de l’émergence d’une réalité transformatrice et, en même temps, en conflit avec le vieux monde. C’est le communisme (libertaire, bien sûr) comme mouvement réel qui abolit l’état actuel des choses. Conflits et construction. Confrontation et créativité sociale. Notre « destruction créatrice ».<br />
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<strong>Septième thèse : De l’audace, encore de l’audace.</strong><br />
Le monde est en effervescence. À des époques de crise ce qui est vieux n’est pas encore mort, mais il est trop faible pour diffuser son pouvoir sur tout l’ensemble social, ce qui est nouveau n’est pas encore né, mais sa nature volcanique transparaît dans les coulisses. C’est le moment où les mouvements sociaux, qui, à d’autres occasion n’auraient pas eu la possibilité de laisser leur marque dans l’ensemble social, peuvent produire des bifurcations décisives dans les systèmes soumis à une tempête chaotique de flux et de pressions. C’est le moment de pousser. Un moment extrêmement dangereux, bien sûr, mais porteur de toutes les possibilités.<br />
Un mouvement libertaire qui s’efforce de devenir un outil utile dans les mains des exploités et des opprimés, un instrument de libération et de transformation de la réalité, ne peut pas rester à l’écart des grands mouvements des plaques tectoniques de notre monde. La société va se transformer radicalement dans les prochaines décennies. Il dépend de nous d’essayer d’influencer dans la direction de ces changements. Personne n’a dit que ce sera facile. Mais la passion et l’audace sont indispensables.<br />
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Voici nos thèses. Nous avons besoin de les soumettre au tribunal de la critique fraternelle et à l’épreuve exigeante de la praxis.<br />
Nous devons nous rencontrer.<br />
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<p>Notes<br />
<a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/1" title="1">1</a> Le traducteur n’est jamais neutre puisque sur mille documents disponibles chaque jour dans une langue, il en choisit quelques uns de temps en temps. J’ai rajouté quelques notes, une façon indirecte de plus, de débattre comme le propose José Luis.<br />
<a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/2" title="2">2</a> La Commune de Paris a été très certainement une lutte révolutionnaire, la chute du Mur de Berlin ne fut qu’ un énième marchandage entre la nouvelle classe exploiteuse marxiste léniniste et les capitalistes.<br />
<a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/3" title="3">3</a> Cela s’appelle le marxisme léninisme et la Tchéka pour les dissidents. Toute similitude avec les lois antiterroristes et les assassinats de la CIA est parfaitement exacte<br />
<a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/4" title="4">4</a> Je crois qu’il faudrait définir travailleurs comme couche sociale de personnes ayant un travail et avec un accès précarisé, minime ou nul au travail du fait de la structure même du capitalisme, dans les différentes parties des continents.<br />
<a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/5" title="5">5</a> Tendance d’une partie des indignés.<br />
<a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/6" title="6">6</a> Centre social autogéré.<br />
<a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2014/10/17/7" title="7">7</a> Les indignés du mouvement du 15-M.<br /></p>Un socialiste honnêteurn:md5:19cada389e678afd539e0a8cf04c39602014-09-15T15:20:00+01:00PatsyActualité politiqueParti socialiste<p>Chronique (septembre 2014)<br />
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Déjà, avec l'affaire Cahuzac, le PS en avait pris un coup, et un bon. Certes, il n'était pas le premier politicien de gauche (enfin, de cette gauche-là) à être malhonnête et âpre au gain. Mais bon, après cinq ans de sarkozysme, et sous le patronage viril d'un président se qualifiant lui-même de « normal », on aurait pu s'attendre à mieux, c'est-à-dire, à moins pitoyable. Mais non, Cahuzac a mis la barre à ce point haut qu'on se dit que non, il sera impossible à un coéquipier de faire mieux, c'est-à-dire pire. <br /></p> <p><img src="http://patsy.blog.free.fr/public/.Thevenoud_m.jpg" alt="Thevenoud.png" style="display:block; margin:0 auto;" title="Thevenoud.png, sept. 2014" /></p>
<p>Mais voilà, personne ne connaissait Thomas Thévenoud. Honnêtement, vous aviez entendu parler de ce Dijonnais, père de « deux jumelles » comme le dit si bien wikipedia (à moins que ce ne soit de trois triplés ? Sait-on jamais!) ? Vous aviez retenu qu'il était secrétaire d'État chargé du Commerce extérieur, du Développement du tourisme et des Français de l'étranger ? Saviez-vous qu'il était diplômé de l'IEP de Paris, l'Institut d'études politiques, ce que certains appellent la « boîte à conformisme » ?<br /></p>
<p>Non, à part les habitants de Saône-et-Loire, territoire dont il tire son mandat de député, personne ne connaissait Thomas Thévenoud. D'ailleurs cela aurait du nous mettre la puce à l'oreille. De la même façon que le choix de Jean-Marc Ayrault comme Premier ministre était de nature à nous inquiéter. A la façon d'un Sarkozy choisissant Fillon, François Hollande s'est choisi un premier ministre d'une personnalité aussi tonitruante et charismatique qu'une endive sans jambon. C'est bien la preuve que les personnalités d'exception se font rares pour incarner l’État. Où sont passés les De Gaulle, les Mitterrand, les Mendès-France ? Z'ont disparu ! On pouvait leur reprocher à juste titre plein de choses, mais au moins, on les pensait cultivés. Avec Sarkozy, c'est sûr, la culture en a pris un coup. Avec Hollande, elle n'existe que par alliance…<br /></p>
<p>Bref, il m'a semblé utile en ce mois de septembre 2014 d'aiguillonner Manuel Valls. Non dans le choix des bolcheviks devant l'entourer car il est évident que je lui fais confiance pour trouver des hommes de gauche pensant comme des gens de droite au sein du Parti socialiste ; nous savons depuis Tony Blair que tout est compatible. Non, il m'a semblé utile de l'aider à repartir à la reconquête des âmes meurtries qui considèrent sottement que les hommes politiques sont tous pourris. C'est faux : ils ne le sont pas toujours et pas tout le temps !
Et quoi de plus beau et lyrique que ce texte publié sur une affiche produite en l'an de grâce 1871 par le Comité central de la Commune. A n'en pas douter, je suis persuadé que Manuel Valls et toi-même, cher auditeur-électeur, vous ne pourrez être que touchés par la volonté farouche de nos communards de faire que les représentants du peuple soient à la hauteur de ceux qui les élurent : « Citoyens, Défiez-vous autant des ambitieux que des parvenus ; les uns comme les autres ne considèrent que leurs propres intérêts et finissent toujours par se considérer comme indispensables. Défiez-vous également des parleurs, incapables de passer à l'action ; ils sacrifieront tout à un discours, à un effet oratoire ou à un mot spirituel. Évitez également ceux que la fortune a trop favorisés, car trop rarement celui qui possède la fortune est disposé à regarder le travailleur comme un frère. Enfin, cherchez des hommes aux convictions sincères, des hommes du Peuple, résolus, actifs, ayant un sens droit et une honnêteté reconnue. Portez vos préférences sur ceux qui ne brigueront pas vos suffrages ; le véritable mérite est modeste, et c'est aux électeurs à choisir leurs hommes, et non à ceux-ci de se présenter. Nous sommes convaincus que, si vous tenez compte de ces observations, vous aurez enfin inauguré la véritable représentation populaire, vous aurez trouvé des mandataires qui ne se considéreront jamais comme vos maîtres. »</p>L'erreur fatale de Sarkozyurn:md5:ddf20d272630b3aacb5a8f061e00f66d2012-05-03T11:55:00+01:00PatsyActualité politique<p><strong>Chronique n°19 (mai 2012)</strong><br />
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Ah le beau débat ! En 2007, nous fûmes frustrés d'un beau combat par la faute d'une candidate de gauche manquant de tout, sauf de bravitude. Cette année, rien de tel. Le Coq de Neuilly ne devait faire qu'une bouchée du Flamby corrézien : il a échoué dans sa mission.</p> <p>Ah le beau débat ! A ma droite, il y avait donc Nicolas Sarkozy, le « Monsieur Je » de la politicaillerie française, celui qui est incapable de se rappeler du nom de son Premier ministre ; d'ailleurs, en avait-il vraiment un ? A ma..., enfin, disons plutôt en face, François Hollande, l'outsider, « l'homme normal », né à Neuilly et diplômé de l'ENA. D’ailleurs, vous aurez noté j’imagine que les trois candidats arrivés en tête au premier tour sont tous de Neuilly-sur-Seine, et non de la cité Lénine dans le 93... <br /></p>
<p>Comme nombre d 'entre vous, j'ai suivi avec une grande attention ce duel au sommet... tout en lisant un livre récent sur le lobbying, les relations publiques et la démocratie contemporaine, autant dire sur la façon dont les puissants, politiciens et industriels, tentent de manipuler, pardon, tentent de convaincre les gueux que nous sommes d'accepter le monde tel qu'il est. <br /></p>
<p>Le temps m'a manqué pour décortiquer cet échange de plus de deux heures, mais j'ai noté quelques petites choses qu'il m'a semblé intéressant de relever en passant.<br /></p>
<p>Je ne veux pas parler de l'inévitable et sempiternelle bataille de chiffres sur la chômage ou la dette ; cette guéguerre autour du « chiffre vrai » nous rappelle seulement que le chiffre ne dit rien en lui-même tant que l'on ne connaît pas les éléments qui ont permis de le constituer. Je ne parlerai pas plus des attaques de Nicolas Sarkozy sur la CGT et son soutien à Hollande, sur son rejet de la lutte des classes et son plaidoyer pour un capitalisme souple où patrons et employés discutent et décident ensemble de la meilleur façon de traverser la crise pour « leur » entreprise. Nicolas a été clair : un syndicat n'est pas là pour « faire de la politique » mais pour accompagner les changements. Amen !<br /></p>
<p>Nicolas Sarkozy a prouvé encore qu'il ne connaissait pas vraiment le monde du travail en évoquant les enseignants. Loin de moi l'idée de transformer nos braves hussards noirs de la République en mineurs de fond et en stakhanovistes, mais ne considérer comme temps de travail que le temps passé devant les élèves est proprement hallucinant. Non Nicolas, le professeur ne travaille pas 18 heures par semaine : il lui arrive de préparer des cours, de corriger des copies, de travailler sur des projets pédagogiques divers et variés...
De même, Nicolas Sarkozy a prouvé qu'il ne savait pas lire. En écrivant que la « rétention » doit être l'exception, François Hollande n'a absolument pas dit qu'il voulait supprimer les centres de rétention. François est un gestionnaire : les centres, il les garde et plutôt deux fois qu'une ! Et faut pas compter sur lui pour baisser les bras face à l'immigration illégale ! C'est qu'le François, il reprocherait même à Sarkozy de ne pas avoir assez expulsé !<br /></p>
<p>Et quand Sarkozy s’appuie sur la triste expérience des socialistes espagnols au pouvoir pour montrer à quel point le socialisme n’était pas à la hauteur pour vaincre la crise, il oublie tout simplement que Zapatero illustrait à ses yeux il y a peu ce socialisme moderne, non-dogmatique et blairiste qu’il convenait de saluer, tandis que le socialisme à la française demeurait prisonnier de ses vieilles lunes marxistes ! Et quand il fait l’apologie du socialisme allemand, il oublie de préciser que la bonne santé apparente de l’économie allemande s’est payée d’un accroissement phénoménal de la pauvreté outre-Rhin, produit par la « réforme » du système d’assurance-chômage.<br /></p>
<p>Sarkozy a échoué sur toute la ligne parce qu’il est parti d’un postulat complètement obsolète. Il a échoué parce qu’il a vainement tenté de faire passer François Hollande pour ce qu'il n'est pas, c’est-à-dire un socialiste.</p>Sarkozy et la symbolique du chiffre 13urn:md5:cb85f53e8a11f01618b63d1ef707f44f2012-02-22T13:07:00+00:00PatsyActualité politique<p><strong>Chronique n°17 (février 2012)</strong><br />
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« La France forte ». Tel est donc l'étendard sous lequel, dressé sur ses ergots, Nicolas Sarkozy va affronter le feu.<br />
« La France forte ». Rendez-vous compte le nombre d'heures de brain-storming qu'il a fallu pour accoucher dans la douleur de ces 13 lettres là. Et tout l'argent que cela a dû coûter ! Parce qu'un conseiller en communication, ça se paie, croyez-moi. Et j'en profite pour appeler tous les Grecs à se former à la comm' et à en faire un second métier, vu que le premier ne cesse de leur rapporter de moins en moins d'argent.</p> <p>Imaginez donc les discussions fiévreuses et passionnées qu'eurent les communicants et le petite satrape de Neuilly avant de nous pondre un tel chef d'oeuvre d'audace. Que veulent les Français ? Ils veulent du travail, un accès à la santé moins onéreux et un avenir pour leurs gosses, bref toutes choses largement incompatibles avec les politiques mises en œuvre depuis des lustres sous nos cieux, puisque ces politiques ont eu pour conséquences concrètes de générer de l’emploi précaire, d’abaisser le niveau des remboursements des médicaments et de faire comprendre aux jeunes que le CDD était l’horizon indépassable de nos temps néo-libéraux. Bref, pas possible de bâtir un slogan à partir de ces thématiques-là. Reste la Sécurité, avec un s majuscule qui fît dire jadis au vieux Marx qu’elle était « la notion sociale la plus haute de la société bourgeoise, la notion de la police : toute la société n'existe que pour garantir à chacun de ses membres la conservation de sa personne, de ses droits et de ses propriétés. » Ca marche bien cette idée-là, parce qu’on a toujours peur du plus pauvre que soi. Mais ce n’est pas pour cette raison que le slogan a été choisi. L’idée centrale est bien de nous faire comprendre que face au monde et à ses tourments, la France se doit d’être solide comme un roc comme jadis elle le fut du temps du général De gaulle.<br /></p>
<p>« La France forte ». 13 lettres pour symboliser cette posture, ce vaisseau France naviguant sur des eaux tumultueuses avec, en amiral, Nicolas lui-même, et dans la chaufferie, le populo qu’en chie grave et en perd la santé.<br />
13 lettres, donc. Et je ne sais si ce fait-là n’est pas à relever. Car le chiffre 13 est singulier, symbolisant aussi bien la chance que le malheur. N’a-t-il pas organisé son premier grand meeting à Marseille, dans les Bouches-du-Rhône, département n°13 ?<br /></p>
<p>Par exemple, Jésus Christ prit son dernier repas en compagnie de douze apôtres, ce qui fait 13. La chance, c’est que ce repas est passé à la postérité ; le malheur, c’est que l’hippie efflanqué se retrouva au gnouf juste après.
Prenons quelques exemples : « Tais-toi Morano » comprend 13 lettres. Je pense que nombre de politiciens de droite ont intimement honte des saillies verbales de la députée de Meurthe-et-Moselle. D’un côté, ils se disent que la stupidité peut rapporter gros en politique, mais de l’autre, on apprécie guère d’être l’objet des railleries par la faute d’un pair.<br />
Autre exemple : « Courage Fillon » comprend 13 lettres. Je suis sûr que nombre de députés de droite n’apprécie guère que Nicolas Sarkozy néglige à ce point celui qui fut son premier ministre pendant cinq ans. Je n’ai pas eu le courage de suivre son premier meeting de campagne, mais je crains qu’il n’ait pas cité une fois François Fillon. Il n’a eu que du « Je » à la bouche, que du « Moi ».<br />
Et je pourrais continuer ainsi : « Guéant raciste » fait treize lettres, tout comme « Patience Coppé », « Haut les cœurs ! », « Le FMI t’emmerde », « DSK gros cochon » ou encore « La Bourse monte, le peuple crève » qui en fait 26, soit 2 fois 13.<br />
Dernier exemple, et peut-être le plus significatif : « Ségolène Royal » comprend 13 lettres. En 2007, cela a porté chance à Nicolas Sarkozy. C’est pour être pour cela qu’en 2012, il a choisi un slogan de 13 lettres.
Ah, on me signale que « Ta gueule Patsy » fait également treize lettres. Le message est entendu, je m’arrêterai donc là…</p>La marche de la pensée à pas de g(u)éanturn:md5:b7e8d668ff3a07b25b0d6e9daa2f3bf72012-02-08T11:57:00+00:00PatsyActualité politique<p><strong>Chronique n°16 (février 2012)</strong><br />
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Qui a dit « Il faut savoir terminer une grève » ? Maurice Thorez en 1936 ? Tout faux !<br />
Qui a dit « La France ne peut accueillir toute la misère du monde » ? Michel Rocard en 1990 ? Tout faux !<br />
« Tout faux » est évidemment une façon de parler, une façon d'interpeler l'auditeur. Thorez et Rocard ont bien prononcé ces mots mais ce sont d’autres qui se sont chargés d'écorner leur pensée.</p> <p>Ainsi, Maurice Thorez, que l'on appelait jadis « le premier stalinien de France » du temps où cela n'était pas pour tout le monde une injure, a dit : « Il faut savoir terminer une grève dès l’instant où les revendications essentielles ont été obtenues », phrase que tout syndicaliste peut faire sienne puisque dans un conflit social, on ne défait jamais complètement l'adversaire et que bien souvent, il est même de bon ton, pour l'avenir, de lui permettre de ne pas perdre la face.<br />
Ainsi, Michel Rocard, ancien leader d'un PSU autogestionnaire qui se voulait une alternative politique et sociale au plat réformisme et au rugueux stalinisme, a dit : « La France ne peut accueillir toute la misère du monde, mais elle doit savoir en prendre fidèlement sa part », phrase prononcée devant un auditoire de militants antiracistes et qui n'avait donc rien d'un plaidoyer pour l'immigration zéro comme certains l'ont laissé entendre.<br /></p>
<p>J'aurais aimé sauver l'honneur de ce brave Claude Guéant et vous prouver que le porte-flingue du maire de Neuilly était victime d'un procès en sorcellerie ou de cette sale manie que nous avons de sortir une phrase de son contexte et de disserter dessus toute honte bue. Mais non, Claude Guéant, ancien conseiller sous Giscard d'Estaing du ministre de l'Intérieur Christian Bonnet, d'où son entrain à porter le chapeau, a bien déclaré : « Contrairement à ce que dit l’idéologie relativiste de gauche, pour nous, toutes les civilisations ne se valent pas. »<br />
En peu de mots, il nous a appris qu'il y avait une « idéologie relativiste de gauche » qui annonçait que toutes les civilisations se valaient. Je ne savais pas. Je pensais plutôt que les ethnologues, sociologues, anthropologues et historiens, notamment de gauche, s'efforçaient de poser un regard non ethnocentriste sur les cultures et civilisations qu'ils étaient amenés à rencontrer, donc s'efforçaient de les comprendre et non de les évaluer ; chose délicate, j'en conviens, car aucun regard n'est neutre puisque nous sommes tous porteurs d'une culture singulière. Et comme le disait Montaigne « Chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage ».<br /></p>
<p>Grâce à Claude Guéant, nous savons maintenant que les civilisations peuvent se classer puisqu'elles ne se valent pas. Il renoue ainsi avec les discours forts en vogue au 19e siècle, quand l’essentiel des intellectuels d’alors, de gauche comme de droite, répétaient que les différents peuples de la terre n'étaient pas arrivés au même stade de développement, et qu'en conséquence, les cultures qu'ils produisaient n'avaient pas la même valeur. Et c'est au nom de la supériorité incontestable de cette soi-disant « civilisation occidentale », au nom du Progrès qu’elle incarne et de l’Humanisme qu’elle porte, que les élites d’alors envoyèrent nos ancêtres coloniser Maghreb et Afrique noire, y apportant le sabre salvateur et le goupillon rédempteur, à moins que ce ne soit l'inverse ; puisqu'il était du devoir des peuples civilisés d'apporter le progrès, le travail forcé, le catéchisme et les enfumades de l'autre côté de la Méditerranée. Après, les « civilisés occidentaux » se firent la guerre qu'ils qualifièrent de mondiale à deux reprises, avec élégance et raffinement comme il se doit.<br /></p>
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<p>Pour appuyer sa démonstration, Claude le pathétique se fit même le défenseur de l'émancipation féminine puisque notre « civilisation » leur garantit l'égalité. Une égalité avec un abattement de salaire à qualification égale, une égalité qui les abonne au temps partiel contraint et au chômage, une égalité qui les rend presque invisible dans les différentes sphères du pouvoir politique et économique. Une égalité toute capitaliste et bourgeoise en somme, tout à fait à sa place sur les frontons des mairies, à côté de Liberté et de Fraternité. Ta « civilisation » n’est décidément pas la mienne, Claude.</p>François Hollande cherche son Goliathurn:md5:3430479ddcbdc104cf45150628c59c172012-01-25T12:42:00+00:00PatsyActualité politique<p><strong>Chronique n°14 (janvier 2012)</strong><br />
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Fallait pas lui marcher sur les pieds au bonhomme ! A force de le voir présenter sous la forme d’un flan à lunettes aux Guignols, on se disait que François Hollande n’entrait pas dans la catégorie des tribuns charismatiques qui font le sel de la vie publique de nos républiques.<br />
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<img src="http://patsy.blog.free.fr/public/.200px-David-goliath28_s.jpg" alt="200px-David-goliath28.jpg" style="display:block; margin:0 auto;" title="200px-David-goliath28.jpg, janv. 2012" /></p> <p>Certainement conscient qu’il lui fallait se bâtir une image d’homme fort, à caractère, capable d’affronter l’ancien maire de Neuilly sur le terrain de l’image, François Hollande nous a pondu un grand discours avec flonflons et salves d’applaudissements régulières le 22 janvier dernier. Et évidemment, pour prendre son envol, il a choisi Le Bourget, ville célèbre pour son salon aérien dédié à l’Aéronautique, celle qui transporte des passagers ou des bombes d’un lieu à un autre. L’avenir nous dira si le bon François ne fut en fait qu’un mirage…<br /></p>
<p>J’avoue humblement ne pas avoir encore pris le temps de décortiquer son plaidoyer pour une France plus juste, plus démocratique et républicaine jusqu’à l’os. Je me contenterai donc de vous glisser quelques mots sur un court passage de son intervention, celle qui traite de la finance.<br />
Que nous a-t-il dit ce 22 janvier ? Il nous a dit ceci : « Je vais vous dire qui est mon adversaire, mon véritable adversaire. Il n’a pas de nom, pas de visage, pas de parti, il ne présentera jamais sa candidature, il ne sera donc pas élu, et pourtant il gouverne. Cet adversaire, c’est le monde de la finance (…) la finance a pris le contrôle de l’économie (…) Cette emprise est devenue un Empire. »<br /></p>
<p>J’imagine qu’à l’écoute de ces mots, grands banquiers, traders, investisseurs et autres encravatés spéculateurs ont du frémir et commencé à se palper tout partout. Mettez-vous à leur place : ils viennent de découvrir qu’alors qu’ils font la pluie et le beau temps depuis des décennies, ils n’ont pas plus de nom que de visage, qu’ils n’existent pas. Imaginez leur tête ! <br />
Et s’ils n’existent pas, s’ils n’ont ni nom, ni visage, qui paient alors leurs hommes de main qui squattent les plateaux télévisés pour y répandre la bonne parole néolibérale, celle qui nous dit que le marché est auto-régulateur et qu’une crise similaire à celle de 1929 est impossible aujourd’hui ? <br />
Et s’ils n’ont pas de parti, comment se fait-il que leur pensée soit devenue hégémonique que ce soit au Fonds monétaire international, à la commission européenne ou dans nombre d’Etats nationaux ?<br /></p>
<p>Alors, cher François, permets-moi de te donner un conseil. Puisqu’il est difficile de se battre contre un adversaire qui n’a pas de nom, pas de visage, pas de parti, et qu’un David audacieux comme tu l’es mérite son Goliath, relis ce passage issu du <em>Manifeste</em> de Marx et Engels : « La bourgeoisie, depuis l'établissement de la grande industrie et du marché mondial, s'est finalement emparée de la souveraineté politique exclusive dans l'Etat représentatif moderne. Le gouvernement moderne n'est qu'un comité qui gère les affaires communes de la classe bourgeoise tout entière. » Maintenant, François, tu sais quel est ton adversaire. Tu peux donc commencer le combat en te faisant hara-kiri…</p>Sarkozy au Rwandaurn:md5:b5893a266a4ad43d41df46e332be4a082010-04-12T22:14:00+01:00PatsyActualité politiqueRwanda<p><strong>Emission n°25 (avril 2010)</strong><br />
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A la fin du mois de février dernier, Nicolas Sarkozy s'est rendu en visite officielle au Rwanda. Visite importante puisque depuis le génocide de 1994, les relations étaient exécrables entre les deux capitales. Elle vient témoigner également de la volonté partagée d'entrer dans une nouvelle ère puisqu'elle intervient trois mois après la reprise officielle des relations diplomatiques entre les deux pays.<br />
Parce que la politique, c'est du théâtre et des symboles, Nicolas Sarkozy a observé une minute de silence devant l'une des quatorze fosses communes du mémorial où sont inhumés les corps de plus de deux cent cinquante mille victimes, et visité le musée du génocide avant de nous délivrer un discours... « sarkozien », sauce Dakar, où se mêlent pseudo-repentir et realpolitik.</p> <p>Pour le pseudo-repentir, il y a d'abord la volonté sarkozienne d'atténuer la responsabilité historique de la France dans le drame rwandais. Il a ainsi déclaré : « Ce qu'il s'est passé ici oblige la communauté internationale, dont la France, à réfléchir à ses erreurs qui l'ont empêchée de prévenir et d'arrêter ce crime épouvantable ». D'un côté, on peut lui donner raison : l'ONU n'a guère brillé en 1993-1994, n'a pas été à la hauteur des événements. Mais ce faisant, il oublie de dire que l'Etat français a toujours considéré les anciennes colonies francophones comme sa chasse gardée, là où ses amis peuvent faire des affaires, là où ses militaires peuvent faire carrière ; et que cette attitude explique en partie les réticences de la communauté internationale à se plier à ses stratégies impérialistes. <br />
Pour le pseudo-repentir, nous avons eu droit également à cette appréciation présidentielle de la politique française de l'époque menée, rappelons-le, non sans tiraillements d'ailleurs, par Mitterrand et Balladur : « Des erreurs d'appréciation, des erreurs politiques ont été commises ici et ont eu des conséquences absolument dramatiques. » Certains y verront un pas en avant, d'autres regretteront que le Président ne se soit pas excusé. Pour ma part, c'est l'emploi du mot « erreur » qui me pose problème. <br /></p>
<p>Mitterrand n'a pas fait d'erreurs en soutenant jusqu'au bout un pouvoir autoritaire au sein duquel s'organisait la machine génocidaire. Il a fait un choix politique clair : celui de défendre la Françafrique et une certaine idée de la francophonie. Il a fait le choix de soutenir diplomatiquement, financièrement et militairement un pouvoir vacillant, connu pour son autoritarisme et sa corruption, contre le Front patriotique rwandais, une rébellion anglophone venu d’Ouganda. L’intervention française au début des années 1990, l’opération Noroît, n’avait qu’un but : permettre à l’armée rwandaise de repousser le FPR au-delà des frontières. Ceci ayant échoué, l’Etat français a poussé le président Habyarimana à accepter une solution politique à la crise : en d’autres termes, à partager le pouvoir avec les rebelles tutsis et les démocrates hutus. Une fois la partie perdue, il a fait le choix, avec l’opération Turquoise, de sauver non pas les tutsis mais les caciques du régime en les ramenant en France ou en leur permettant de s’installer au Zaïre, pays frontalier à partir duquel ils pourraient entamer une reconquête militaire du Rwanda. <br /></p>
<p>Certains voudraient opposer le président Juvénal Habyarimana aux durs du régime, réunis autour de son épouse. Mais ne l’oublions pas : les milices populaires, ces sinistres Interahamwe qui seront la cheville ouvrière du génocide, et la Radio-télévision libre des Mille collines, célèbres pour ses appels aux meurtres des tutsis, ne sont pas nés au moment du génocide, en 1994, mais deux ans auparavant. C’est pourquoi l’assassinat non encore élucidé du président Juvénal Habyarimana n’est pas la cause du déclenchement de cette folie génocidaire. En clair : une fois mort Habyarimana le « modéré », l’aile dure du régime a pris les commandes et envoyé, en représailles, milices, armée et gendarmerie tuer les tutsis. Non, le génocide était planifié depuis longtemps. Il ne manquait que le prétexte pour le mettre en œuvre.<br /></p>
<p>Oui, l’Etat français est coupable de complicité de génocide au sens où, d’un point de vue juridique, « un accusé est complice de génocide s’il a sciemment et volontairement aidé ou assisté ou provoqué une ou d’autres personnes à commettre le génocide, sachant que cette ou ces personnes commettaient le génocide, même si l’accusé n’avait pas lui-même l’intention spécifique de détruire en tout ou en partie le groupe national, ethnique, racial ou religieux, visé comme tel ».<br /></p>
<p>Il est tellement coupable que sous la pression, les parlementaires consentirent à ce que voit le jour en 1998 une mission d’information où politiciens de droite et de gauche se sont efforcés dans un rapport de laver de tout soupçon armée et appareil d’Etat. Le rapporteur, le socialiste Paul Quilès, le dira très clairement et sans la moindre honte : « La France n’a en aucune manière incité, encouragé, aidé ou soutenu ceux qui ont orchestré le génocide ». Le discours récent de Nicolas Sarkozy à Kigali, qui évoque des erreurs d’appréciation et des erreurs politiques, témoigne donc d’une certaine inflexion, et on peut y voir l’influence de Bernard Kouchner qui a toujours refusé le discours hégémonique, voire négationniste de la majorité de la classe politique hexagonale.<br /></p>
<p>Pourquoi une telle inflexion ? Parce que le temps est venu de construire une nouvelle relation bilatérale et de clore un chapitre peu glorieux de l’histoire commune.<br />
Le pouvoir rwandais veut des excuses mais planent au-dessus de sa tête des accusations de crimes contre l’humanité pour son implication dans la guerre qui a sévi dans l’est du Zaïre à la fin des années 1990 (une guerre qui avait pour but de nettoyer les camps de réfugiés rwandais encadrés par les génocidaires. Un nettoyage qui s’est déroulé dans des conditions effroyables, évidemment). Alors, à défaut d’excuses, il peut se contenter d’un pseudo-repentir qu’il saura valoriser sur la scène politique nationale, et parler de « choses sérieuses », c’est-à-dire du retour des investissements français au Rwanda.<br /></p>
<p>Le pouvoir français ne veut pas faire d’excuses car la France des droits de l’homme, et son orgueil de puissance moyenne sur le déclin, n’entend pas s’humilier devant un micro-Etat africain et finir devant le Tribunal pénal international. Et puis, elle a compté longtemps sur la fragilité du pouvoir au Rwanda. Quinze ans après, ceux qui ont pris les rênes de l’Etat le tiennent encore fermement, et les anciens génocidaires ne sont plus en mesure de contester militairement leur autorité. En d’autres termes, Paris doit composer avec Kigali car il n’y a pas solution de rechange.
Alors dans cette Afrique en pleine mutation où les Etats privilégient dorénavant les relations multilatérales, il est judicieux de ne pas laisser les cadavres d’hier empêcher la signature des contrats juteux de demain. <br /></p>Le Monde vu par Jean-François Bayarturn:md5:1fae87361b9732f2640550e044d5b6602010-04-07T22:00:00+01:00PatsyActualité politiqueCapitalismeDémocratie bourgeoiseEtat<p><strong>Emission n°24 (avril 2010)</strong><br /></p>
<p>Le politiste Jean-François Bayart est l'un des intellectuels français les plus brillants qu'il m'ait été donné de lire, et c'est en raison même de cela qu'il est fort discret dans les grands médias, du moins je le suppose. Flânant sur le Net, je suis tombé sur l'une de ses interview avec le journaliste Antoine Mercier, interview intitulé « L'Etat n'est pas la victime mais l'enfant de la globalisation ».</p> <p>Antoine Mercier lui demandant si la crise économique actuelle était une crise de la globalisation, voici ce que Jean-François Bayart a répondu :
« C’est une crise dans la globalisation, dans le néolibéralisme. Ses origines sont très clairement néolibérales. Mais, contrairement à ce que l’on dit parfois, ses conséquences s’inscriront également dans la globalisation néolibérale. Je ne crois pas du tout en effet que la crise engendrera une déconnection par rapport à cette globalisation. Nous ne sommes pas dans une perspective de sortie du néolibéralisme. Il est même probable, à l’inverse, que la crise radicalise la logique du néolibéralisme. Pour le comprendre il faut accepter l’idée un peu paradoxale que, contrairement à ce que l’on dit souvent, l’État n’est pas la victime de la globalisation mais l’enfant de cette globalisation.<br /></p>
<p>(...) On voit très bien comment la crise va accentuer l’orientation sécuritaire de l’économie mondiale et de l’État-nation simultanément. Le 11 septembre avait déjà renforcé les préoccupations et les prérogatives sécuritaires de l’État sans remettre en cause la libéralisation des marchés des capitaux, des services et des biens. Par exemple, l’État a effectué un retour en force dans la surveillance des flux des capitaux et des flux des voyageurs. Les services secrets américains contrôlent désormais très attentivement les voyageurs transatlantiques avec les fameux scanners corporels dans les aéroports qui arrivent maintenant en Europe. Mais cette surveillance coercitive s’effectue par le biais de compagnies privées de transport qui elles-mêmes demandent à des compagnies privées de sécurité de vérifier les titres de séjour ou les visas de leurs passagers à l’embarquement. Là, on a une très belle forme de renforcement des pouvoirs policiers par le biais de la privatisation, par le bais de la compagnie privée, qui est extrêmement intéressant politiquement. Si vous aviez dû, par exemple, supprimer le droit constitutionnel d’asile en modifiant la Constitution de la Vème République, cela aurait suscité, dans l’opinion française, un émoi considérable. On constate cependant que le droit d’asile a été évidé, jour après jour, en raison de cette délégation à des opérateurs privés, du droit de contrôler les passeports et de refuser ou d’accepter des passagers. De la même manière, la privatisation de la guerre aux États-Unis a permis à l’administration Clinton, avant même l’administration Bush, de faire échapper l’intervention américaine sur des théâtres de guerre à l’étranger au contrôle du Congrès puisque ce sont des personnels privés qui interviennent en Colombie contre la drogue, en Yougoslavie pour soutenir la Croatie contre la Serbie, aujourd’hui en Irak ou en Afghanistan. Ces personnels privés peuvent être engagés sur des théâtres d’opérations, sans approbation du Congrès alors même que ce sont naturellement des faux-nez du Pentagone et de l’Armée américaine.</p>
<p>On le voit, la privatisation de l’État peut aller de pair avec le renforcement de ses prérogatives sécuritaires. C’est quelque chose que nous avons d’ailleurs très bien connu en France sous l’Ancien Régime lorsque la monarchie absolutiste était relayée par les opérateurs privés, notamment par les fermiers généraux qui étaient chargés de prélever l’impôt.<br />
(...) <a href="http://patsy.blog.free.fr/index.php?post/2010/04/07/Cette privatisation" title="Cette privatisation">Cette privatisation</a> va profondément transformer la teneur même de nos systèmes politiques. Faut-il encore parler de démocratie ? On peut en douter. Par exemple, la privatisation de la télévision ou de la radio ne va pas nécessairement de pair avec le désengagement du contrôle des autorités politiques de l’information. On le voit nettement en Italie, avec le phénomène Berlusconi, mais on le voit également en France où l’on ne peut pas dire que l’Élysée soit aujourd’hui moins présent dans le paysage médiatique qu’il ne l’était il y a quelques années ou même dans les années 1960, à l’époque de l’ORTF. Donc, la privatisation peut aller de pair avec une remise en cause de la démocratie.<br />
L’évolution du vocabulaire est sur ce plan significative. On parle de moins en moins dedémocratie et de plus en plus de gouvernance, terme extrêmement technocratique. On parle de régulation, on ne parle plus de pouvoir, on ne parle plus de dimension politique. La gouvernance, c’est un peu Foucault sans le pouvoir, un concept assez surréaliste. De plus en plus on nous parlera à propos de l’Afrique sub-saharienne de la nécessité de la bonne gouvernance. Mais on ne parlera pas de l’impératif catégorique de la démocratie, de la souveraineté nationale, de la liberté.<br /></p>
<p>Donc, je crois que la teneur même de nos sociétés politiques est en train d’évoluer et que sous couvert de dépolitisation, on va voir émerger des pouvoirs autoritaires qui échapperont de plus en plus non seulement au contrôle du peuple mais même à la délibération des peuples. C’est une évolution extraordinairement préoccupante et liberticide. »<br /></p>
<p>A celles et ceux que l'écoute de ces propos accablerait, je ne peux qu'offrir cette phrase célèbre de Antonio Gramsci, inspirée de Romain Rolland : « Il faut allier le pessimisme de l'intelligence à l'optimisme de la volonté. »</p>